Lecture des souvenirs de la piscine rue des Champs

Les 13 textes qui vont suivre ont été sélectionnés parmi les 71 textes que nous avons reçus lors de notre appel à souvenir de la piscine de la rue des Champs. Car si, en cette année 2022, le Musée de la Piscine fête ses 20 ans, la piscine en tant que piscine fête, elle, ses 90 ans. Ils ont été lus par leurs auteurs ou par des conteurs lors de la Nuit des Arts du 14 mai 2022, dans le bassin même de notre chère piscine devant un public attentif…

Une cinquantaine d’autres textes ont été édités, soit intégralement soit en « morceaux choisis » dans le magazine Gens et Pierres de Roubaix n° 32.

 

Après d’ultimes consignes… C’est parti !

 

 

 

LA PISCINE DE LA RUE DES CHAMPS : une chanson de Christian Ladoë

(sur l’air de « Souvenirs attention danger » de Serge Lama)

 Si vous passez un jour ou l’autre à Roubaix

Allez donc faire un petit tour au musée

Un lieu magique et magnifique de surcroit

Dans l’ancienne piscine d’autrefois

 

On entend les cris des baigneurs d’antan

Retentir encore dans l’endroit comme avant

Les yeux fermés je me revois moi l’enfant

La chair de poule m’envahissant

 

Là-bas, j’ai des souvenirs de gamins

Là-bas, mon père me tenant par la main

Là-bas, les maîtres-nageurs (maîtes-nageux) ont laissé leurs empreintes

 

Là-bas, Neptune est surnommé le lion

Là-bas, comme la Scala y a des balcons

Là-bas, les douches sont d’v’nues vitrines d’exposition

 

Cette piscine-musée art déco

Pour Diligent ce fut un joyau

Symbole de renouveau pour Roubaix

On y vient du monde entier

 

Triomphe pour la plus belle piscine de France

Pour cette ville est un atout une chance

Dans un style mauresque et byzantin

Flotte encore et toujours un parfum

 

Là-bas, un musée se trouve dans le bain

Là-bas, des statues bordent le bassin

Là-bas, y a « LE » café face au jardin, y a même

 

Là-bas, trône un portique monumental

Là-bas, deux siècles d’art-industrie s’étalent

Là-bas, ça évoque une atmosphère abbatiale

 

Mais moi quand je suis là c’ que je vois

Ce sont des visages et prénoms d’autrefois

Serge, Rémy, Alain, Bernard, Cyprien

Prosper, Richard et Lucien,

René, Aldolphe, Maurice, Mario et Charlot

Sans oublier Marcel, et Michel Legros

Tant d’autres que ça m’fait drôle d’en parler

Sur ma joue, une larme vient d’couler

 

Là-bas, derrière l’comptoir y avait René

Là-bas, l’odeur d’ses p’tits pains au pâté

Là-bas, un bout d’ mon passé y est gravé et même

 

Là-bas, des milliers gens s’y sont baignés

Là-bas, des milliers d’gens s’y sont lavés

Là-bas, des milliers d’gens arpentent encore les allées

 

Grand merci à Monsieur Bruno Gaudichon

Et bravo à Monsieur Jean-Paul Philippon

D’avoir réussi à garder pour longtemps

La piscine de la rue des champs

 

Jeudi 27 octobre 2016

 

Pour information, son père, René Ladoë, a été chef de bassin de la piscine, et son frère Rémy Ladoë maître-nageur…

 

 

Odilon lit son grand-père, Didier Knoff

La piscine : une histoire d’amour

La piscine : en 1947, mon premier bain in vitro quand ma mère, Antigone, venait avec son gros ventre se « tremper » (c’est elle qui me l’a dit évidemment).

La piscine : ma première « brasse coulée » dans les bras de mon père, André, plus impressionné par le bruit que par l’eau.

La piscine : le dimanche matin en famille, on venait « se faire propre » dans les baignoires, nous habitions une courée sans aucun confort évidemment, les dames des bains qui tambourinaient sur les portes à la fin du temps réglementaire.

La piscine : avec l’école, souvenirs de ces bouées, ces bouchons en liège et la sangle en caoutchouc qui me donnait des boutons d’urticaire, cette boucle serrée par les maîtres-nageurs et me pinçait la peau.

La piscine : le bruit du combat contre le jet du « lion », le bruit des clés de cabines cognées sur les rambardes pour indiquer la fin de la séance.

La piscine : l’odeur du chlore, l’odeur de la gauloise fumée au bas par les « hommes » quand on faisait la queue pour entrer.

La piscine : en 1985 alors photographe à Nord Eclair, un copain journaliste (Luc Hossepied) me demande de faire des photos pour monter un dossier et empêcher sa destruction en la déclarant à l’inventaire des Monuments historiques ce qui a entrainé la rencontre avec Jean-François Boudailliez.

La piscine : en 1985 toujours, en possession des clés, j’organise une séance photo mémorable avec des élèves de l’ESAAT de Roubaix, photos exposées à l’ouverture en octobre 2001.

La piscine : en 2001, mon petit-fils Gaspard en avait fait sa cour de récréation, les t’chios qui suivent les animateurs à la queue leu leu comme des poussins derrière leur mère, Odilon et Irène, ma descendance 2e génération, accrocs des ateliers du mercredi.

La piscine : les expressions d’émerveillement des visiteurs devant le bassin et »son soleil ».

La piscine : la complicité avec Bruno Gaudichon et son équipe, l’asso des amis et son inénarrable président, Maurice Decroix, connaître les coulisses et se sentir chez soi…

MA PISCINE

 

 

Docteur Pierre Delahousse a une revendication à faire !

Je suis grand ! J’ai dix ans. Je cours vite, je joue au football dans la cour du collège… je ne sais pas nager. Mon père, bon nageur, estime, qu’en cette année 1946, un garçon de mon âge, doit savoir nager, plonger. Si j’ai envie d’apprendre, une petite appréhension s’installe ; sans me l’avouer, je crains de me noyer dans le « grand fond ». Je me tais car la fierté, ou l’orgueil d’un homme de 10 ans ne permet pas d’exprimer sa peur. Mes parents sont très occupés ; ils ne peuvent prendre le temps de m’accompagner à la piscine ; la solution est vite trouvée : quelques leçons par un maître-nageur feront de moi un « enfant de Neptune ».

Muni de plusieurs tickets de leçons d’une demi-heure, à pied par la rue du collège, la rue Pellart, la rue Nain, j’arrive rue des champs où le portail et ses arcades m’accueillent. Après passage en cabine et pédiluve, prudemment je m’assied au bord de la piscine pour observer, et admirer les « grands », qui nagent, plongent du tremplin, dans une atmosphère saturée d’humidité tiède, bruyante de voix d’adolescents qui se poursuivent dans l’eau et autour du bassin.

Près d’un angle, un maître-nageur d’un volume corporel, et surtout abdominal, impressionnant exhorte et morigène un enfant de mon âge qui s’efforce de réaliser les mouvements commandés de manière saccadée. Soudain, le maître se saisit d’une grosse gaffe de plusieurs mètres et, d’un appui vigoureux, enfonce le malheureux élève sous l’eau ; l’enfant se débat, « boit la tasse », sort la tête de l’eau et s’accroche désespérément au rebord du bassin ; il pleure, le maître rit et se moque de lui. Stupéfait, choqué par ce procédé que je juge barbare, je n’ose intervenir et m’éloigne bien décidé à me soustraire à ce bourreau et à ce supplice.

Mais que faire pour apprendre à nager ? L’idée se précise dans mon cerveau d’enfant : j’apprendrai seul ! Je ne dirai rien aux parents et leur rendrai les tickets quand je nagerai.

C’est ainsi qu’au « petit fond » près de la bouche de Neptune déversant à grand débit son eau dans le bassin, j’appris à nager seul, découvrant par moi-même que je flottais en coordonnant quelques mouvements simples des bras et des jambes.

Quelques séances plus tard, j’appris à mes parents que je nageais et leur avouais ma supercherie ; je ne fut pas réprimandé ni puni ; mon père m’accompagna un jour à la piscine pour vérifier la véracité de ma capacité à nager ; il tenta, mais vainement, d’être remboursé du prix des leçons non-effectuées. C’est ainsi qu’après trois quarts de siècle, la Piscine m’est toujours redevable du prix de ces leçons ! J’en appelle à M. Gaudichon…

 

 

Pour le petit Bernard (Catrice), la piscine a été un véritable cauchemar…

« Aujourd’hui, c’est piscine, les enfants !

N’oubliez pas vos serviettes de bain, votre peigne et vos cadenas.

Prenez soin de votre petit frère, pour son premier bain ! »

Avec mes 4 sœurs, nous arrivons à vélo, rue des champs. Nous cadenassons et posons nos bicyclettes sur le trottoir contre l’imposante façade de la piscine. C’est la première fois qu’on m’y emmène…

Un billet de 5 francs à la main, le sac de sport en bandoulière, nous montons les marches vers le grand hall au bout duquel la caissière, du haut de sa cabine vitrée, nous prend quelques francs contre un ticket d’entrée. Au loin, résonnent des cris. Une odeur de javel nous prend au nez. Mes grandes sœurs sont excitées. Du haut de mes six ans, je suis intrigué… Arrivés face à cet immense bassin inondé de lumière, le bruit s’intensifie, l’air est chargé d’une forte humidité et le sol est glissant.

Je prends la main de ma sœur Françoise… Pantalon, marcel et sabots blancs, un bonhomme, le regard peu amène, nous conduit à l’étage, vers les cabines individuelles. Avec ses clés, il frappe rudement à une porte, nous l’ouvre violemment et éructe : « cabine 21 » !

Françoise lance à mes sœurs : « Rendez-vous au Lion ! »  Au lion ? On n’est pas au zoo… je ne comprends pas…

Dans la cabine carrelée de céramique, je me déshabille et enfile un caleçon de bain tricoté par ma mère avec de la grosse laine rouge qui gratte ; un élastique distendu est censé le maintenir en place. Oserai-je me montrer comme ça au lion ?… Ma sœur demande de m’attendre derrière la porte afin qu’elle puisse mettre, hors de ma vue, son maillot.

En l’attendant, à travers les croisillons de la rambarde du couloir qui surplombe le bassin, j’observe les nageurs qui grouillent dans l’eau. Certains, ceints de bouées rectangulaires grises autour du ventre, essayent d’avancer. D’autres, coiffés de bonnets de bain à fleurs en caoutchouc, font la planche puis disparaissent sous l’eau. D’autres encore, se bouchent le nez et sautent dans l’eau en hurlant. Au grand fond, du haut du plongeoir, un fou se jette dans le vide ! Je me sens minuscule et craintif…

Sur la passerelle qui traverse le bassin, un « tout blanc » repêche un enfant dans un filet. Sur un bord du bassin, un autre « tout blanc » enfonce dans l’eau une longue perche à laquelle s’agrippe une dame affolée qui fait des bulles. Pendant ce temps, son copain n’arrête pas de taper sa clé sonore contre la rambarde métallique pour rappeler à l’ordre des imprudents. Des plouf par-ci, des flop par-là, des cris ici, des hurlements là. Assourdi par ce vacarme, je suis terrifié…

Un bonhomme « tout blanc » me demande ce que je fais là, tout seul. « Tu ne dois pas rester ici ! », me réprimande-t-il à l’instant où ma sœur, parée d’un maillot de laine rouge comme le mien, sort enfin. Main dans sa main que je serre très fort, nous descendons les escaliers où il est écrit « Interdit de courir ». Nous avons rendez-vous au lion avec les autres. J’appréhende…

Quelques marches plus bas, voilà le petit bain. Ebahi, je découvre le lion ; ouf ! il ne rugit pas mais vomit des trombes d’eau bouillonnantes. Son eau n’est pas assez chaude à mon goût. Mes sœurs sont au rendez-vous et se précipitent pour m’apprendre à nager. On me bouscule, on m’éclabousse, je tombe et bois la tasse ! Je tousse… j’ai froid… j’ai peur… je panique… je pleure… Je veux remonter, je veux rentrer…

Françoise se dévoue. Elle demande à un « tout blanc » d’ouvrir la cabine mais elle a oublié le numéro ! Le «tout blanc » devient tout rouge et rouspète. Je suis tout bleu de peur et me cache derrière ma sœur. J’ai froid, je tremble et claque des dents… Dans la cabine retrouvée elle me frictionne à l’eau de Cologne. Rhabillés, nous partons. En sortant, pour me consoler, Françoise m’achète, à la petite boulangerie en face de la piscine, un petit pain au chocolat. De retour à la maison, je suis malade : une crise de foie !

La nuit, je fais un cauchemar : des « tout blancs » me poursuivent avec leurs perches en tapant leurs clés sur les rambardes. « Rendez-vous au lion » me crient-ils ! Haletant, je m’y rends. Là, il m’éclabousse et rugit : « je m’appelle Neptune » !

Maman réveille le petit Bernard en nage…

 

 

 

Elisabeth Lesoin, aujourd’hui Bordelaise, a été lue par la conteuse Véronique Lecomte

Tous les Roubaisiens la connaissent, bien sûr, et plusieurs générations y sont allées. Malheureusement, je n’ai jamais su combien cette piscine était précieuse. Je l’ai appris quand elle est devenue un musée célèbre et, là, j’ai réalisé combien elle était belle et que je ne l’avais pas assez appréciée quand j’y allais dans mes « années lycée ». Bien sûr, j’adorais le lion, les couleurs du vitrail et les cabines où nous allions nous déshabiller, le bain de vapeur… Mais tout cela me paraissait normal.

En fait, aller à la piscine était pour moi un moment de liberté, même si c’était une activité sportive organisée par le Lycée : je me souviens des mardis où je partais de la maison et où je marchais jusqu’à la rue des Champs pour retrouver mes camarades de classe et où, privilège, je rentrais directement chez moi après la séance. Ce qui me donnait une sensation de liberté et l’occasion d’admirer les timbres du magasin de philatélie presque en face.

Aller nager était quand même pour moi un plaisir mitigé : j’étais myope et ne voyais pas grand-chose sans mes lunettes, premier cauchemar. Ensuite me montrer en maillot de bains était une épreuve que seules les complexées dans mon genre peuvent comprendre. Mais je me rappelle avoir arboré un joli bikini (on les appelait comme ça, à l’époque) à carreaux vert et rouge. J’étais assez fière de ma tenue, pour une fois, mais mon obsession était la peur de perdre une des deux pièces, et j’ai passé mon temps à vérifier qu’elles étaient bien en place. Je ne sais plus si je l’ai imaginé ou si c’est vraiment arrivé, mais je me vois perdre le haut dans une honte insupportable, vous pouvez vous en douter. Réalité ou fantasme ? Toujours est-il que les sorties suivantes, j’ai cessé de vouloir faire la belle et j’ai mis un maillot une pièce bien plus adapté. Il m’est resté néanmoins le problème de ma vue qui a beaucoup gâché mon plaisir d’être dans l’eau.

Cette piscine reste dans mes souvenirs colorés et plutôt joyeux et j’ai pris beaucoup de plaisir à la redécouvrir lors de mes visites à Roubaix.

 

 

 

Claude Quesnoit, indisponible, a confié la lecture de son texte à Marc Dubrul

Dans les années 1950 j’habitais avec mes parents à Wasquehal. Ils décidèrent que je devais apprendre à nager. C’était normalement une chance, et à l’époque le jour de congé scolaire était le jeudi.

C’est ainsi qu’un professeur d’E.P.S faisait le tour du quartier et nous emmenait à 3 ou 4 en voiture à la piscine de Roubaix.

Chaque jeudi c’était le même scénario : le midi je mangeais peu, l’estomac noué, en pensant à ce qui allait m’arriver. Une fois sur place, en maillot, après être passé par ces fameuses cabines dans le bruit et la résonance, nous étions pris en charge ! Le professeur nous amenait alors au bord du bassin où la profondeur atteignait peut-être 3 mètres ! Et c’est à ce moment là que j’aurais préféré apprendre un autre sport ! Car le professeur nous obligeait à sauter dans le grand bassin, sans ceinture ni brassard. Quelle frayeur ! Sous l’eau j’avais l’impression que cela durait un quart d’heure, une éternité, pour remonter. Je fermais les yeux pensant que cela irait plus vite ainsi et que j’aurais plus de chance de remonter vivant. Ce qui arrivait bien sûr !

La phase suivante n’était pas plus agréable : on restait dans l’eau et l’enseignant avec sa perche nous éloignait du bord pour nous obliger à être allongés et là aussi quelle frayeur de n’avoir aucun appui. Peut-être avais-je une ceinture ! Mais la peur était tellement grande que je n’en ai aucun souvenir ! C’était la pédagogie de l’époque, maintenant heureusement l’apprentissage et l’approche de la natation sont plus ludiques et plus pédagogiques. Et cela se répétait toutes les semaines ! Quelle hantise et quelle phobie du jeudi !

A 18 ans je ne savais toujours pas nager ! J’avais choisi un autre sport : la course de haies, je m’entraînais en même temps que Guy Drut et je suis même devenu champion de France minime de Fédération. Comme je voulais devenir professeur d’E.P.S j’ai dû savoir nager ! J’ai surmonté mes peurs et j’ai appris à nager seul !

Mais maintenant à plus de 73 ans quand je vais à la piscine les souvenirs désagréables s’estompent. Et surtout ce sont les œuvres, les expositions permanentes et temporaires qui me donnent joie et plaisir, comme une revanche personnelle ! Et déambuler dans ce bel espace m’apaise.

 

 

Charlotte Vinchon, pourtant orléanaise aujourd’hui, est venue témoigner de la magie de la mosaïque bleue !

J’avais enfoui, loin dans ma mémoire, le jour où j’ai su « nager au grand fond, sans bouée ». Revoir, lors d’une visite du Musée, la mosaïque bleue, qui faisait le tour du grand bassin, a fait ressurgir ce moment magique où ma main a lâché le rebord.

Était-ce vraiment le grand fond ? Mes 6 ans le croyaient ! J’avais du céder ma bouée à un frère ou un cousin (je suis de ces familles nombreuses roubaisiennes) sur l’insistance de ma mère sans doute : l’emprunteur de bouée était plus petit, il avait peur de l’eau, etc. Je ne me souviens pas de son argumentation, mais j’ai obéi.

J’imagine ma main crispée sur le rebord, mon front collé à la mosaïque. Les autres s’étaient égayés dans la grande eau. J’ai lâché prise. Et, à ma surprise, l’eau m’a soutenue, entourée, rassurée. Je lui ai fait confiance. Cette sensation, je la retrouve encore à chaque baignade, à cet instant magique où je pénètre dans l’eau, en mer ou en piscine.

 

 

 

Et voici un souvenir à quatre mains de Roselyne Soubeyran-Salembier, Marie-Do Réthoré- Salembier, Isabelle Soubeyran-Salembier, Marie-Andrée Chabauty-Réthoré : un groupe de Roubaix dans son genre !

Marie-Do Réthoré se fait le porte-parole de ses amies. Et excusez du peu : cette papillonneuse modeste est championne et recordwoman de France ! Aujourd’hui, elle est passée d’un bassin à l’autre, puisqu’elle est créatrice au Grand Bassin !

En 1963, avec mes 2 sœurs, un peu par hasard avons adhéré au club. C’est ainsi que le quatuor se forme. Nous avons alors entre 9 et 13 ans. A cette époque, où nous étions encore débutantes, qui aurait pu deviner que 4 ans plus tard, nous formerions un relais et serions finalistes des championnats de France ASSU à Monaco ? Et qui aurait pu imaginer alors, que cette extraordinaire piscine de Roubaix seraient, non seulement le paradis de notre jeunesse, le lieu de notre passion mais un lieu de rencontres décisives pour notre vie ?

 Adolescentes, nous entrons dans cette piscine comme on entre au paradis. Après avoir monté quatre à quatre les premiers escaliers du grand hall, puis les seconds, nous arrivons chez nous. Nous faisons une pause incontournable devant le tableau du club où s’affichent nos titres de gloire, coupures de journaux avec les gros titres dans lesquels nous espérons voir nos noms, et quelques informations sur l’agenda du club qui nous excitent d’avance, lieux et dates des prochaines compétitions, Rallye, Ducasse à Pierrot, boum déguisée etc. Nous arrivons toujours en avance, nous croisons avec indifférence les gens qui sortent de la séance publique précédente : ce sont les baigneurs, nous, nous sommes les nageurs, les nageurs de club. Nous attendons assises en équilibre sur la longue barre de cuivre qui sépare l’immense couloir dans le sens de la longueur et permet de cadrer la queue pour le contrôle des tickets. Nous, nous avons des cartes d’entrées gratuites ! L’attente dans ce grand hall est un joyeux capharnaüm d’échanges de poignées de main, d’histoires d’écoliers, de jeux, de farces, d’éclats de rire et de bonne camaraderie. Le cliquetis rythmé des clefs du cabinier sur les barres de cuivre qui cernent le bassin nous fait dresser l’oreille : il annonce la fin de la séance publique et le début de notre entrainement. Nous nous engouffrons alors dans le couloir des cabines, les garçons filent à droite dans leur vestiaire commun, celui des filles est à gauche. On les aime ces vestiaires, on peut y papoter à notre guise, commérages et confidences s’entrecroisent dans un joyeux babille et quand quelqu’un s’approche des vitres brouillées pour nous dire de presser le mouvement, nous hurlons en choeur « on n’entre pas !».

L’ambiance de notre paradis est très particulière le lundi : la piscine étant fermée au public ce jour-là, le chauffage se remet en route à très petite allure. On se gèle dans les vestiaires. Une fois glissées dans nos maillots de bain, on enfile nos peignoirs que nous avons du mal à quitter arrivées au bord du bassin ! Le « PLOC » des grosses gouttes d’eau glaciale qui tombent de façon anarchique du haut plafond sombre augmente la sensation de froid. Il faut prendre son courage à deux mains pour rentrer dans cette eau gelée aux reflets verts et jaunes. Les plus courageux plongent directement dans le bassin. Les moins téméraires descendent par l’échelle et s’immergent un peu à la fois en retenant leur souffle. Puis l’entraîneur perdant patience, on finit par se jeter dans l’eau à toute vitesse. Malgré l’inconfort, on s’entraîne avec sérieux et grand plaisir. Les mardis et les jeudis aussi, les glaglas en moins. Le chlore lui, est permanent : les lunettes n’existent pas, il nous pique les yeux et nous les rougit. Le soir nous nous mettons des gouttes de lait dans les yeux pour atténuer les démangeaisons.

Parfois, à la fin de l’entraînement, nous avons droit à 10 minutes de plongeoir. Quelle joie! Alors une grappe toute frissonnante s’agglutine en bas de l’échelle du 3 mètres et des bombes éclaboussantes éclatent à la chaîne. Pour accéder au plongeoir du 5 mètres, il faut faire tout un périple à travers les escaliers. Mais quelle gloire quand nous osons enfin nous jeter dans le vide et quel plaisir de toucher des deux pieds le fond mystérieux et rarement atteint du grand fond de 4 mètres !

Il nous arrive également d’oser pénétrer dans les salles de sudation-ou « bains de vapeur »-situées côté petit bain de chaque côté d’une rangée de hautes douches, derrière le lion. C’est une épreuve pour le nez. Une odeur âcre de chaude humidité, de chlore et de transpiration flotte dans une vapeur épaisse et suffocante, on ne se voit plus à 1 mètre. Nous y rentrons et ressortons presque aussitôt pour sauter dans l’eau, saisies par la sensation de fraîcheur nous poussons des cris et nageons à toute vitesse pour nous réchauffer !

Certains dimanches, le club organise des compétitions. Nous recevons des clubs de la région mais aussi des clubs parisiens. C’est un évènement! Nous adorons ! Le bar est ouvert. Notre bassin de 50 mètres se transforme en bassin de 25 mètres. Un « mur » en bois est installé qui coupe le bassin en deux et forme une sorte passerelle. Toutes les lignes d’eau sont accrochées pour former les couloirs …des chaises sont placées tout autour du bassin pour des spectateurs déchaussés.

Comme on a un peu de temps d’attente entre nos épreuves, nous nous échappons en douce, nous osons monter au second étage, nous errons pieds nus sur un sol fréquenté ni par le public ni par les serpillères, il faut voir nos plantes de pieds à la descente…noires ! Exploratrices intrépides nous nous aventurons même jusqu’au 3ème étage. Ça sent le moisi, nous voyons le bassin de très haut et la rosace de très très près, ses vitraux ternis sont cernés de crasse noire mais c’est pourtant grandiose. Près de ce plafond, arrondi, majestueux, composé d’un crépi sombre et grossier, nous avons l’impression d’être dans une grotte. On peut distinguer des minuscules stalactites d’où tombent des gouttes d’eau glaciale qui nous semblent venir du fond des temps.

Dans le même esprit, nous visitons les bains douches, espace strictement interdit. Nous y découvrons des salles spacieuses dans lesquelles de grandes baignoires sont creusées à même le sol, elles sont vides, tout est sec, terne, silencieux. L’atmosphère est lugubre, nous avons peur d’y être enfermées et le moindre bruit nous fait détaler comme des lapins 

En 1965, nous avons eu l’immense honneur, l’incroyable chance de recevoir dans « notre » piscine l’un des plus grands entraîneurs du monde, l’australien Harry Gallager. L’entraîneur de Dawn Fraser, la première femme à nager le 100 mètres nage libre en moins d’1 minute. Un véritable événement.

Invité par la Fédération Fraçaise de Natation, il venait transmettre ses méthodes d’entraînement dans quelques clubs français Ce soir là, nous sommes une bonne trentaine. Il nous prend tous en charge et nous fait nager dans le sens de la largeur. C’est une grande première. Accrochés à la barre de cuivre, entre les crachoirs, au signal nous devons sprinter sur les 12 mètres 50. Le dernier arrivé est éliminé et ainsi de suite, autant de largeurs que de nageurs… ! Le champion est le dernier restant. On a appelé cet exercice « une australienne ». C’est encore pratiqué aujourd’hui.

L’entraîneur avait d’ailleurs remarqué Marie-Andrée la petite dossiste…comme elle était fière d’avoir été sélectionnée pour un stage parisien d’une semaine.

 Après la séance du jeudi midi pendant laquelle, un peu plus âgées, nous apprenons à nager aux plus petits du club, NOUS MANGEONS À LA PISCINE ! La mère de Marie-Andrée, qui avait déjà institué ce rituel avant-guerre avec sa propre mère, avait eu la merveilleuse idée de le perpétuer pour ses enfants. Le quatuor a suivi. A peine habillées et chaussées sans avoir noué nos lacets, les cheveux mouillés et en bataille, nous déboulons des cabines et nous nous asseyons affamées autour des tables du bar. Des tables solides en bois foncé recouvertes d’une espèce de lino vert tendre avec un gros cendrier publicitaire planté au centre. Deux dames sont derrière le bar, deux roubaisiennes, petites aux lunettes rondes et aux frisettes blanches. L’une d’elle vient prendre la commande et elle crie à l’autre qui doit être sa sœur : « Un pâté Denise !». Alors Denise ouvre un petit pain de Bruxelles à la mie épaisse, le beurre généreusement, le garnit d’une couche de pâté ou d’une tranche de Hollande et y plante deux cornichons. Ajoutez à cela une limonade blanche, un ZIP pour le dessert et nous voilà comblées ! Les mères prennent un Poorter, une bière très brune qu’on leur sert dans des chopes en verre.

A travers l’évocation de ces quelques souvenirs qui s’étalent des années 1963 à 1970, nous espérons vous avoir fait ressentir en quoi ce lieu unique fut, en son âpre beauté, le paradis de notre jeunesse. Quand notre piscine a fermé, nous avons eu un énorme pincement au coeur. Lorsque, quelques années plus tard, nous avons appris qu’elle allait devenir un musée, nous étions tout à fait incrédules. Quand les travaux furent terminés, nous nous sommes précipitées, et avons été époustouflées et très très émues par la mise en valeur de ce patrimoine unique qui nous avait été si familier.

* Marie-Do a épousé le frère ainé de Marie-Andrée. Marie-André a épousé un gars du sud, mais elle a entrainé dans son sillon, Roselyne et Isabelle, qui ont épousé à leur tour les cousins germains du mari de Marie-Andrée. Voilà pourquoi le quatuor est toujours uni !

 

 

 

Pour Laurence Declercq, la leçon de natation du jeudi était un véritable enfer…

C’est jeudi, le jour de la piscine pour la leçon de natation. Je ne veux pas y aller : je pleure, j’ai mal au ventre. Ma mère bouleversée, tente de me consoler par des câlins doux ou par des arguments auxquels elle s’accroche pour ne pas flancher et se fait violence pour ne pas me garder dans son giron. Elle me tient contre elle et me dit qu’au moins, j’aurai la chance de savoir nager, que papa m’y emmènera Dimanche pour jouer, qu’elle a mis un bon goûter dans mon sac : des « Pepito » et que je pourrai les manger sur la route en sortant de la piscine ! Je pleure mais je sais que je n’échapperai pas au supplice. Du haut de mes 7 ans, j’ai bien cerné le pouvoir indéniable de la fatalité qui frappe l’être humain ! Dès qu’il sort du ventre ou des bras de sa mère, il lui faut affronter son destin, la peur au ventre, la morve au nez.

Arrivée à l’école, la maîtresse est là. Elle nous attend. Au coup de sifflet, nous nous rangeons deux par deux, je suis avec ma copine Anne qui n’en mène pas large non plus. Elle serre ma main à m’en broyer les doigts. Puis ça y est nous empruntons la route qui mène vers la rue des Champs, nom improbable si l’on connaissait la teneur de mes angoisses, rue de la torture eut été mieux approprié ! En plus, comble de mon infortune, le chemin qui sépare notre petite école Square Pierre Catteau à la piscine de la rue des champs n’est pas des plus longs ! Quelques centaines de mètres à peine… Juste le temps de se morfondre dans le tréfond de la peur. Si au moins la foudre pouvait frapper, sans la tuer juste la paralyser, la vilaine traîtresse impitoyable qui nous mène au royaume des tourments ! Mais notre maîtresse avance, nous cinglant de remontrances parce qu’on traine ! La belle affaire, il faudrait être fou pour se gargariser à l’idée de se rendre vers la mort d’un bond pas !

Hélas nous n’avons pas d’autre issue que de suivre la maîtresse ! Et nous voilà donc devant les marches de la piscine, cette bâtisse majestueuse, si accueillante et joyeuse lorsque je m’y rends le Dimanche avec mon papa et si austère et monstrueuse le Jeudi où elle ressert dans ses entrailles l’enfer ! Enfer tenu non par des êtres cornus mais par des hommes en short de bain et en tongs : Les maîtres-nageurs !

J’ai peur !

Dans le hall, l’odeur du javel nous alerte, le supplice répand ses effluves… Ses serviteurs sont aux aguets ! Les maîtres-nageurs se présentent à nous, avides d’exercer leur pouvoir un cordon autour du cou au bout duquel pend un sifflet d’apparence inoffensive, voire ridicule mais qui s’avère être le signe premier de leur autorité.

J’ai peur, j’ai mal au ventre…

A coup de sifflet donc, on nous répartit : vestiaire ou cabine ! Je préfère les cabines, je suis seule avec ma copine et n’ai pas à réaliser des prouesses en m’habillant ou en me déshabillant pour cacher mon derrière à toute la classe ! La cabine est toutefois plus proche du feu de l’enfer puisque la porte opposée à celle de l’entrée donne sur les douches et déjà on peut y percevoir de manière auditive et angoissante les premiers tourments. Je suis terrorisée et m’aperçois subitement que je dois faire pipi, je n’ose pas demander à aller au cabinet, car les agents et la traîtresse vont me crier dessus. J’ai peur. J’essaie de me retenir mais, ce n’est pas facile, même impossible ! C’est ainsi que fatalement un liquide chaud finit par couler le long de mes jambes et qu’une petite flaque se répand sur le sol ! J’ai fait pipi ! Ma copine se moque « T’as pissé ! » mais n’est pas loin de faire pareil… De l’autre côté de la porte on nous presse, on tape sur les portes, le sifflet résonne, on hurle : « Dépêchez-vous ! ». On termine de se mettre en tenue, je n’aime pas mon chapeau de bain : « Il est jaune cocu » me dit Anne. Le sien est rose et plus joli. Mais peu importe, j’ai du mal à l’enfiler. Ma maman m’a fait des nattes heureusement c’est plus facile à glisser sous le caoutchouc jaune cocu, mais tout de même ça reste compliqué ! Je sors de la cabine pour la douche qui déverse une eau glaciale, je ne m’éternise pas…

Et me voilà sur les bords du tartare : j’ai froid et j’ai peur ! Les maîtres-nageurs sont là, ils expliquent les consignes. J’écoute ces êtres qui ont le pouvoir de vie ou de mort sur chacun d’entre nous. Et ô comble, on les voit sourire en nous regardant ! Ils se savent forts de leur supériorité ! Ils détiennent en effet une arme de poids : la perche ! Outil paradoxal qui peut nous sauver de l’enfer ou nous y plonger !

Les consignes expliquées, on nous demande donc de les appliquer. Nous allons tous passer un à un. J’ai peur, c’est bientôt mon tour, mais je me cache, espérant faire croire que je suis déjà passée. Mais ils ont des yeux de fouine, rien ne leur échappe. L’un d’entre eux m’a vue, il m’ordonne de m’agripper à la perche afin que je saute dans le grand bassin. J’ai peur, mais je n’ai pas le choix ! Je saisis l’extrémité de la perche et saute dans l’enfer en fermant les yeux.

Un bruit sourd de bouillon alors m’enveloppe, je m’agrippe à la perche, je m’y cramponne en espérant m’en faire une alliée afin de ne pas me noyer ! Mais la perche est au service du diable et m’échappe des mains ! L’agent en short et tongs me laisse paniquer et me débattre, il crie, je ne comprends rien, je panique, il crie, je ne comprends rien, je cherche la perche, mais l’agent la tient loin de moi, il me fait signe que je dois me rapprocher du bord sans l’aide de la perche mais en tentant de l’attraper ! Je l’aperçois alors au-dessus de ma tête : elle est toute proche ! Oh douce amie, je suis sauvée, je vais la saisir et revenir sur la terre ferme, mais l’être en tongs en a décidé autrement. Il crie et appuie la perche sur ma tête, je panique, j’ai la tête plongée dans l’eau, je bois la tasse. A travers les bouillons d’où ma tête émerge entre deux poussées de perche sur la tête et entre différentes tasses que j’avale (je me dis que je vais finir par boire toute la piscine) je vois les têtes grimaçantes des serviteurs de l’enfer qui rient de me voir mourir! Je vais mourir, je ne veux pas mourir : alors je me débats comme je peux contre ce monstre qu’est la piscine, un des agents voyant ma détermination me tend finalement la perche : est-ce un piège de sa part ? J’ose la saisir et ô joie, il me ramène sur le bord. C’est un miracle, je n’ai plus de souffle mais je suis vivante ! La maîtresse, traîtresse, discute comme si de rien n’était, avec un des agents en tongs : ma vie n’a aucune importance à ses yeux ! Puis elle me voit, me dit que j’ai échoué à l’épreuve «de la tête dans l’eau», l’être en short et tongs confirme, me dit que je suis « une peureuse et pleurnicharde » et que je recommencerai la semaine prochaine. Il me fait signe de rejoindre le petit bassin.

J’ai envie de pleurer, je les déteste, je veux les pousser dans la piscine et les assommer avec cette perche… Mais j’ai 7 ans, alors je me contente de le penser très fort et je ravale ma morve en me disant que la semaine prochaine, c’est pas maintenant, que maintenant j’ai le droit d’aller au petit bassin ! Le petit bassin c’est tellement bien : il y a le lion qui crache et puis il y a mes copains, copines avec qui je vais jouer ! Et puis, tout à l’heure il y aura mes Pepito dans mon sac, et puis Dimanche il y aura la piscine avec mon papa : car si le Jeudi la piscine c’est l’enfer. Le Dimanche, la piscine, c’est le Paradis !

 

 

 

 

C’est avec un acrostiche et en trois actes que Chantal Duprez a retracé l’histoire de notre chère piscine…

 

Acte 1

Pare moi de ton eau vivifiante

Imagine moi naïade ondulante,

Sirène ondoyante

Caresse moi de ton eau bienveillante

Irradie par tes verrières scintillantes

Neptune, crache ton eau puissante

Entraîne moi au loin rayonnante

 

Acte 2

Péril en la demeure

Insidieusement, le chlore ronge la toiture

Sauvons nous au plus vite

Catastrophe en vue

Irréversibilité de la destruction à petit feu

Navrant de laisser une telle beauté

Et…, et…, et si on faisait un musée

 

Acte 3

Plongeon dans le grand bain de l’art déco

Invitation à la rêverie

Sésame vers l’émotion

Charme du lieu

Incarnation du beau

Nourriture de l’imaginaire

Etonnement, un musée dans une piscine, qui l’eut cru ?

 

 

 

 

Martine Wiestrach, elle, a une véritable passion pour la « Petite Chatelaine » de Camille Claudel . Elle lui a dédié un poème…

Ton regard a la fragilité

D’une enfant dont le cœur est blessé

Comme celui de Camille, qui t’a façonnée

Observant la lumière, espères-tu la trouver ?

Ton visage tend vers l’espérance,

Tu incarnes l’innocence,

Apanage de l’enfance,

Et de certains malades,

Qui gardent un cœur d’enfant

Refusant l’hypocrisie des grands.

Ces adultes qui tuent même les enfants.

 

 

 

 

 

28 ans seulement ! Abdelhak Foudi n’a pas l’âge d’avoir nagé dans la piscine  mais il aime la piscine pour tout autre chose… N’ayant pas pu se libérer pour lire son texte, il est représenté par Bernadette Bourgeois, conteuse

En te revoyant après autant de temps, tout l’amour que j’avais enfui pour toi, est remonté à la surface telles des larmes. Comme dans notre enfance, tu te tenais debout, face à cette petite piscine, espérant t’y voir déformé ou peut-être plus beau, comme Narcisse recherchant son bien aimé.

Je te regardais comme les visiteurs regardaient les chefs-d’oeuvre du musée, fascinés. Ils ne comprenaient pas, que la vraie beauté ne peut jamais être figée sur une toile ou garder pour toujours. L’art et la beauté passent comme les saisons, mais se préservent comme un souvenir délicieux.

En t’observant, j’ai senti mes larmes monter sans tomber. Elles sont restées bloquées à l’entrée de mes cils. Comme des souliers restés sur le palier pour ne pas salir. Parce qu’un homme, ça ne pleure pas. Je t’ai regardé encore et encore, toi qui continuais de regarder cette courte étendue d’eau.

Quelle belle mise en abyme, qui loin de m’abîmer, me console et me rend l’espoir d’un monde merveilleux. Tu t’es alors retourné, et j’ai plongé dans tes yeux plein d’émotion. Cela m’a ramené à notre enfance poussière de Roubaix. Cela m’a rappelé que tu étais mon passé et que ce que je désirai le plus pour l’avenir, étais de t’embrasser à l’infini comme le va-et-vient des vagues sur la plage.

Voilà, mon unique prière. Mon seul souvenir.

 

 

 

Et maintenant la Piscine en alexandrins…  elle le vaut bien pour Xavier Martin !

C’était un jour d’hiver, humide, gris et banal,

Une envie de sortir, besoin d’art et de beau,

Et nous nous dîmes super, c’est moment idéal,

Pour enfin découvrir, ce Musée art déco.

 

D’extérieur très cubique, un peu gris et austère,

Il cache bien son jeu, sa chaleur intérieure,

Comme s’il était pudique, bien que plein de mystères,

Lui pourtant lumineux, accueillant et rieur.

 

Si je vous dis rieur, c’est pour l’histoire du lieu,

Qui se rappelle à nous, en entrant dans ses salles,

Par rires et clameurs, des baigneurs, de leurs jeux

Qui raisonnent partout, dans ce charmant dédale.

 

L’atmosphère du passé, rappelle jeunes années,

Mille neuf cent trente deux, ces publiques bains-douches,

Son bassin éclairé, vitraux ensoleillés,

Albert BAERT ingénieux, architecte, y fait mouche.

 

Carreaux blancs de ses murs, ont été conservés,

Reflétant chaque instant, chaque passage du temps,

Visiteurs aux cœurs purs, venus déambuler,

S’enivrer du présent, au milieu du passé.

 

La Piscine a 20 ans, jeune fille au printemps,

En chaque salle découverte, qu’il nous parle ou non,

L’art explose vibrant, attrayant, impactant,

Grande scène ouverte, pour artistes de renom.

 

Les arts appliqués, les Beaux Arts déployés,

Un resto, une boutique, un jardin adapté,

Sur Roubaix, son passé, industriel chargé,

Textile et unique, tout ici est pensé.

Les artistes locaux, y sont mis à l’honneur,

Mémoire est en ce lieu, où instruments et chants,

Ont remplacé bruits d’eau, pour acteurs et conteurs

S’imprégnant de leur mieux, de ce lieu émouvant.

 

Les regards sont surpris, caressent ici un marbre,

Une courbe offerte, des lèvres dessinées.

Une terre cuite s’ensuit, un labeur sans palabre,

Musculature parfaite, d’un sculpteur engagé.

 

Une odalisque attend, perdue dans ses pensées,

Un enfant est figé, parfum d’éternité,

Des coqs combattants, Rémy Cogghe a œuvré,

Des Pompon assemblés, tels Arche de Noé.

 

Une petite Châtelaine, à la natte courbée,

Par Camille CLAUDEL, au regard inspiré,

Céramiques par dizaines, devant nous présentées,

PICASSO et de celles, que l’on peut contempler.

 

Le groupe de Roubaix, Jean Roulland et Dodeigne,

Van Hecke et Hemery, Leroy, pour en citer,

Lumière emprisonnée, expressives elles saignent,

Spectateur est surpris, voire décontenancé.

 

L’atelier de Bouchard, Henri de son prénom,

Panorama grandiose, de la place de Roubaix,

Tout n’est qu’art et histoire, nous comble d’émotions,

Et nous métamorphose, en ce monde imparfait.

 

Venez vite et vibrez, en ce lieu si magique,

Venez vite partager, variété des cimaises,

Vous pouvez vous poser, et rester extatiques

Laissez-vous emporter, respirez et aimez !

 

 

 

Et voilà… nous garderons tous de ces lectures à la Piscine un souvenir heureux et ému. Merci à M. Gaudichon de nous avoir accueillis, merci à Maurice Decroix d’avoir intercédé en notre faveur et merci à Juliette de nous avoir facilité la vie !

 

Des images des lectures

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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4 Comments

  1. Suberbe initiative, superbe réalisation, superbe mise en valeur
    Roubaix est dynamique,
    Bravo
    Continuez

    J’admire

  2. Super soirée pleine d’émotion !
    Super moments de convivialité.
    Excellents conteurs, orateurs, acteurs dont un chanteur !

    La piscine d’antan a permis de faire de belles retrouvailles
    et d’émerger tous ces souvenirs noyés depuis tant d’années.

    De la brasse, passons aux embrassades trop longtemps restées à l’eau !

  3. Belle soirée qui nous a plongés dans les souvenirs pathétiques ou paradisiaques de cette magnifique piscine olympique (à deux centimètres près) !
    Belle prestation des conteurs sur le passé
    Belles rencontres pour l’avenir !
    Le petit Bernard

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