La Société des Artistes roubaisiens

Elle fut constituée dès 1907 par des hommes courageux qui avaient la ferme conviction que l’Art pouvait se manifester à Roubaix. Evidemment, les premiers pas furent hésitants : dans les débuts, tout Roubaisien plus ou moins peintre ou sculpteur exposa au Salon librement. Si cette façon d’envisager les choses permit à des talents, consacrés depuis, de se révéler, elle donna lieu aussi à des expositions d’œuvres faibles qui discréditèrent un moment notre Salon. La presse s’en fit l’écho et nous en avons tenu compte.

Depuis, une sélection toute naturelle s’est opérée insensiblement et, maintenant, sans être trop sévère, un jury, composé d’artistes de générations différentes, veille au filtrage des œuvres. Le Jury représente les directions d’Arts les plus opposées quant à la forme, mais il n’admet qu’une chose : « la bonne peinture », et c’est ce lien-là qui forme son homogénéité. Nous ajoutons que le jury tient à être juste et impartial et qu’il n’obéit à aucune considération étrangère à l’Art.

Ce que nous voulons, c’est prouver aux Roubaisiens que les œuvres de leurs concitoyens sont à considérer avec intérêt ; qu’il y a chez nous des artistes à encourager, et que si l’appui moral et financier des amateurs misent faire cette œuvre louable nous pouvons espérer pour notre cité une vie artistique inconnue jusqu’ici.

« Que le public roubaisien le comprenne ! Notre effort en sera récompensé et dans cette sympathie, nous puiserons de nouvelles forces pour l’avenir ». C’est en ces termes, profession de foi, en quelque sorte, du Comité de la Société des Artistes roubaisiens, présidé par M. Paul Dervaux, assisté de Mme Lantoine-Neveux, d’Henri Delvarre, de Jean Diagoras et de quelques autres, que s’ouvrait le 12e Salon à la Galerie Dujardin, 14, boulevard de Paris à Roubaix, et où figuraient dans les membres fondateurs, Pierre Cordonnier, Jean Courrier, Eugène Dujardin et quelques autres. Salon qui fut ouvert du 19 au 29 mai 1929.

En 1969, dans le Journal de Roubaix, on rappelle que (en 1919 ?) Eugène Dujardin, avec l’aide de Jean Courrier et Sonneville, estimait qu’il fallait rassembler les artistes pour faire mieux connaître leurs œuvres. Chaque année, le Salon fut alors mis sur pied et s’est tenu jusqu’en 1925 (1929 !) au 14, boulevard de Paris, puis à l’Hôtel de Ville avec le succès que l’on sait. Les Présidents qui se sont succédé s’appellent MM. Paul Dervaux, Georges Teneul, Achille Vilquin, Thérèse Delfortries, Gérard Lemaître.

Il faut noter qu’en 1969, des artistes de Monchen-Gladbach et de Bradford, jumelés avec Roubaix, exposeront au Salon. Le Salon était alors présidé par M. Victor Provo, Maire, Président du Conseil Général du Nord. Les Artistes roubaisiens exposeront également dans la capitale, en effet à la galerie RG, sous l’impulsion de Gilbert Sailly. Dix huit artistes exposeront à Paris en 1966, 1968 et en 1969.

Gilbert Sailly sera Président du Salon en succédant à André Camion de 1974 à 1995, soit 21 ans de présidence. Alain Delsalle lui succède en novembre 1996. Il est Président à ce jour et réélu pour cinq années en 2004.

C’est en 1996, après un hommage à Gilbert Sailly et à Eugène Declercq que le Salon rendra hommage à un invité d’honneur de prestige. Ce sera d’abord en 1997 Maurice Maes, puis René Jacob en 1998, Arthur van Hecke en 1996, en 2003 Abel Leblanc et en 2004 Henri Delvarre et Achille Vilquin. Mme Courrier qui succédait à son père Eugène Dujardin, accueillit les jeunes du Salon des Artistes roubaisiens dans sa galerie du boulevard de Paris, puis de la rue du Vieil Abreuvoir. Les artistes roubaisiens sont reconnaissants à Henri Delvarre et Maurice Maes de leur avoir montré la voie et il est naturel que le Salon leur rendit hommage.

En 1954, Arthur van Hecke organise une grande exposition d’art contemporain à la galerie Dujardin et entraîne ses camarades du groupe de Roubaix à quitter le Salon. Juste retour des choses, il reviendra en 1999 comme invité d’honneur du Salon présidé par M. Vandierendonck, Maire de Roubaix. A cette occasion, le Musée La Piscine et son conservateur M. Bruno Gaudichon, prêteront des œuvres de van Hecke pour cet hommage, comme ils l’ont fait pour Maurice Maes en 1997. Le prochain invité d’honneur en décembre 2005 sera Jean Pierre Delannoy, ancien professeur à l’ERSEP et artiste peintre.

Le Salon compte à ce jour en moyenne 60 exposants de Roubaix et de la région ayant fait leurs études à Roubaix pour 120 artistes inscrits au fichier de l’association. En 2007, la Société fête son centenaire. Une exposition avec tous les artistes qui ont fait le renom de Roubaix sont invités à cette occasion, ainsi que les Sociétaires du Salon.

 

Alain Delsalle,

Président de la Société des Artistes roubaisiens

Poèmes de Musards

La « Muse de Nadaud » ne s’est pas bornée à accueillir les lauréats des Joutes Poétiques. Conformément à ses statuts, elle a admis en son sein des « sans grades » qui n’étaient pas nécessairement des « sans mérites ». Et, parmi ceux-là, n’ont pas manqué de vrais poètes, qui surent exprimer avec justesse leurs idées et leurs sentiments. Tel fut le cas, entre autres, de Jean Carlier.

 

MINUTE HEUREUSE

 Je l’ai vécue enfin, cette minute heureuse,

Court instant de bonheur longuement attendu.

C’était hier, déjà ! Dans mon âme peureuse

Le souvenir fuyant demain sera perdu…

 

C’était hier ? Mais non ! C’était, je crois, la veille…

Ah ! Je vous perds déjà, souvenirs trop confus !

Mais le Destin, méchant, me susurre à l’oreille :

« C’était… n’importe quand, mais ce ne sera plus ! »

 CARLIER Jean (Roubaix)

 

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Roubaix a donné son nom à une place proche du centre-ville, hommage amplement mérité. Charles Bodart-Timal a consacré en effet plusieurs ouvrages historiques à cette cité qui le vit naître. Il fut également l’auteur de livrets d’opérettes et de quelques deux cents chansons. Membre des Rosati de différentes Provinces, de la Société des Lettres, Arts et Sciences de Lille, de la Ligue Wallonne, Grand Prix d’Excellence du Comité Flamand de France, il fut honoré de la Médaille d’Or de la ville de Tourcoing.

 » Pétri de la glaise de notre terroir, il avait su forger, au cœur de son existence laborieuse, une philosophie souriante. Il aimait avant tout la simplicité, cette psychologie franche et primesautière qui est à la base des gens de chez nous «  (Gaston Gilman).

IL EST DES YEUX (1)

 Il est des yeux couleur de rêve

Où semble se mirer l’azur ;

Il en est d’autres qui, sans trêve,

Brillent d’un amour grand et pur.

Mais d’un bout à l’autre du monde,

Les plus doux et les plus charmants

C’est encor, partout à la ronde,

                        Les yeux des mamans !

 

Ils ont connu bien des tristesses,

Ces yeux, ces pauvres yeux usés ;

A veiller sur notre jeunesse

Ils se sont, hélas ! Epuisés.

Ils ont souffert de tant d’alarmes !

Et Dieu seul sait, dans les tourments

Ce qu’ils ont pu verser de larmes,

                        Les yeux des mamans !

 

Quand les mamans quittent la terre

Pour le suprême rendez-vous,

Même au sein du profond mystère,

Elles se souviennent de nous,

Leur regard nous cherche sans cesse

Et près de nous, à tous moments

Ils sont là, chargés de tendresse,

                        Les yeux des mamans !

 Charles BODART-TIMAL

(1)    Chanson, musique de Eddy Jura

 

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« Noble poète roubaisien » a dit Me Joseph Crombé, son compatriote et émule. Docteur en Droit, mais aussi homme de Lettres, ce proche parent d’Amédée Prouvost publia une étude sur le chansonnier patoisant Gustave Olivier – suivie d’une autre, sociologique, « La Cité de Pascal ». Grand voyageur, d’une débordante activité, il est l’auteur de trois recueils : « Les Rimes de Fer », « Les Mansuétudes » et « Feux Errants ». « Sans qu’il les ait traités avec un égal bonheur, nul des grands thèmes lyriques, toutefois n’a été négligé par lui. La grandeur ne manque pas à ces évocations et elles pourront charmer et fortifier plus d’une âme selon le vœu du poète parvenu à l’âge de la maturité ». (André Mabille de Poncheville).

 LA MAISON

 On meurt au chant des coqs dans les fermes heureuses,

A l’heure où la servante ouvre les volets bleus,

A l’heure où l’aube lente, aux teintes vaporeuses,

Caresse la maison de ses rayons joyeux.

 

Une agreste rumeur remplit toute la plaine.

Les oiseaux s’éveillant mêlent leurs gazouillis.

L’eau s’élance, plus vive, au creux de la fontaine.

Le cri du vieux berger rassemble les brebis.

 

On meurt ; et l’on entend dans la chambre voisine

Une femme qui range et la laine et le lin ;

Et bientôt, sous l’effort d’une main enfantine,

Une corde grincer dans le petit jardin.

 

Une angoisse glacée étreint votre poitrine

Pendant que le repas fume sur le foyer,

Et pendant que le repas fume sur le foyer,

Et pendant que l’horloge, au mur de la cuisine,

Marque à chaque labour son rythme régulier.

 

Qu’importe à la Nature indifférente et belle

De notre dernier jour le terme douloureux !

Mais toi, Maison, mais toi ! Vas-tu faire comme elle,

Vas-tu, sans t’attrister, nous voir fermer les yeux ?

 Charles DROULERS (Roubaix)

 

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« Talentueux poète roubaisien peu connu de ses compatriotes » lit-on dans la revue « La Fauvette » qui, en date du 25 août 1907, annonçait son décès. De sa plume ne nous restent que de rares œuvres parues dans cet éphémère périodique.

PREMIER BAISER

 Elan du cœur qui sur la lèvre

Vient se briser

Explosion de douce fièvre,

Premier baiser !

Je me souviens de ton ivresse,

Je me souviens

De ta fraîcheur enchanteresse ;

Et je conviens

Que l’amour n’a rien de plus tendre

A t’opposer,

O douceur que rien ne peut rendre,

Premier baiser !

Paul PHILIPPE (Roubaix)

Juin 1891

 

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Prématurément disparu, il appartenait à la célèbre famille d’industriels qui contribua puissamment au développement économique de Roubaix. De bonne heure attiré par les Lettres, il signa trois recueils, influencés par l’Ecole Symboliste : « L’Ame Voyageuse », « Sonates au Clair de Lune » (couronné par l’Académie Française) et « Le Poème du Travail et du Rêve ».

« Malgré le temps, les métamorphoses du Progrès, quand les lauriers trop éclatants des idoles fugitives seront tombés en poudre, les vers d’Amédée Prouvost – dont la délicate sensibilité aimait les joies familiales ». (Marc Choquet )

 Il fut un poète attachant, loué par l’éminent critique Jules Lemaître et par ses pairs, tels Henri de Régnier et Anna de Noailles. « Pour juger du talent d’Amédée Prouvost, a écrit Jean Piat, le mieux est de relire son œuvre. Elle est à la Bibliothèque Municipale. » Que dire de mieux ?

 LA MAIN DU TRAVAILLEUR

 Main d’artisan, ô main calleuse qu’ennoblit

Le dur labeur de la tâche quotidienne

Main sans cesse ébranlée au choc des établis,

Familière du poids des fardeaux et des peines,

 

Main meurtrie et blessée où quelquefois on lit,

Blanche ligne à côté du sillon bleu des veines,

L’entaille de l’outil dans le réseau des plis,

Main rude et ferme comme une écorce de chêne !

 

Main qui ne connaît pas la molle oisiveté

Et qui, le froid hiver ou le brillant été,

Travaille sans répit pour vaincre la misère

 

Hâtive d’assurer le pain du lendemain,

Combien j’aime sentir ton étreinte sincère

Main noire d’artisan, ô vigilante main !

Amédée PROUVOST (Roubaix)

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Russe d’origine, venu en France vers 1920, il ne tarda pas à fréquenter les milieux artistiques de Roubaix. Il traduisait en vers français des auteurs russes, en particulier les poètes (Pouchkine Lermontov). Parallèlement, il composait des strophes (et des textes en prose) d’excellente facture. Des prix lui furent attribués par l’Académie d’Arras, les Rosati de Flandre, et aux Jeux Floraux de Bigorre. A cette activité littéraire, il ajoutait celles de peintre d’icônes et de compositeur de musique, pratiquant avec talent le piano le violon et le chant choral. Un vrai « Musard » !

MENDIANT

Un mendiant restait debout

Sous le porche d’un sanctuaire ;

Le malheureux était à bout,

Souffrant la faim et la misère.

 

Il ne demandait que du pain,

Ses yeux n’étaient qu’une prière :

Eh bien ! Quelqu’un mit dans sa main

Tendue et tremblante, une pierre.

 

Je mendiais avec langueur,

Avec des larmes, ta tendresse,

Et tu ne laisses, dans mon cœur

Trahi, que la noire détresse.

 G. LERMONTOV (Roubaix)

Traduit du russe par Nicolas Vnoukovsky – 21 août 1946

Gustave Nadaud

NOTRE POETE CHANSONNIER ROUBAISIEN

C’est en face de la Place de la Liberté dans un immeuble aujourd’hui disparu, qu’il voit le jour le 21 février 1820. La future grande cité n’est alors qu’une bourgade semi rurale d’environ 12 000 âmes où, timidement, l’industrie textile commence à s’implanter.

La famille du nouveau-né y exploite un négoce de tissus. Est-il interdit de penser que, peut-être, l’heureux père rêva de voir un jour Charles-Gustave lui succéder à la tête de l’entreprise ? Le sort devait en décider autrement…

Le bambin va fréquenter l’école des Frères, rue de l’Hospice. Ensuite, on l’enverra à Paris où, comme interne, il sera admis au très réputé Collège Rollin. Reçu bachelier (en ce temps-là, c’était quelque chose !) il réintègre le nid familial. Et il lui faut s’initier aux subtilités de la gestion et de la comptabilité. A 20 ans, sa formation étant jugée satisfaisante, le voici de retour dans la capitale, mais chargé, cette fois, de tenir la succursale des Ets Vouzelle-Nadaud, récemment installée.

Prétendre, à l’instar de certains chroniqueurs, qu’il négligea plus ou moins sa tâche (préférant le commerce des Muses) est inexact. Il s’en acquitta consciencieusement. Toutefois (lui-même l’avoue) « en cachette et la nuit plutôt que le jour » il rime… des chansonnettes dont certaines un peu lestes lui valent des admonestations paternelles.

Peu à peu le jeune auteur se fait connaître soit dans les Cénacles littéraires du Quartier Latin, soit dans les guinguettes à la mode ou des les salons bourgeois. Il détaille ses couplets dont il a composé la musique. Ayant appris non seulement le solfège, mais aussi le piano, il s’accompagne sans problème.

Il a 32 ans lorsque se lève le Jour de Gloire. Sa chanson « Les Deux Gendarmes » est un triomphe, qui se propagera irrésistiblement. Partout, à pleine voix, l’on reprendra le refrain :

« Brigadier, répondit Pandore,

Brigadier, vous avez raison ! ».

L’auteur ne sommeillera pas sur ses lauriers. Abandonnant les tissus, il s’adonna aux lettres. Nous lui devons plus de 500 chansons (dont une bonne centaine paroles et musique), des opérettes de salon, une comédie, un roman, un « solfège poétique et musical », des « notes d’un infirmier » en 1871 et en 1892, un an avant sa mort, les « Souvenirs d’un Vieux Roubaisien ».

Ses droits d’auteur, pourtant, ne lui apportaient que des ressources médiocres. Il vivait au jour le jour, ou presque. En 1881, l’édition complète de ses chansons lui procura enfin une confortable aisance. Il affecta une part de l’argent reçu à la création d’une Caisse de Secours en faveur des Chansonniers nécessiteux. Le reste lui permit de se faire construire à Nice une modeste résidence secondaire baptisée « Villa Pandore ». Il vivait à Paris mais se déplaçait beaucoup. Sa cité natale n’était pas oubliée : il adorait venir s’y retremper parmi les siens. Par ailleurs, Président d’Honneur du vénérable « Cercle du Dauphin », il retrouvait là ses grands amis patoisants : Desrousseaux, le Lillois et Watteeuw, le Tourquennois, un sacré trio qui, lors des réunions, ne distillait pas l’ennui !

 

Le monument à Nadaud au Parc Barbieux ©EG

Faut-il ajouter que dans ses vers, en maints endroits, Nadaud a exprimé sa tendresse pour Roubaix, cette ville trop souvent dépeinte comme rébarbative, noircie par la fumée des usines, sentant le suint à longueur de rues :

« Oui, tout me charme et me pénètre

Dans ce coin de terre et de ciel.

Si j’étais fleur, j’y voudrais naître,

Abeille j’y ferais mon miel.

 

Pourquoi ? Je m’en vais vous le dire

Et vous me donnerez raison :

Ce site, ce toit que j’admire

C’est mon pays et ma maison. »

 

Combien de ses confrères ont rendu un juste hommage à notre chansonnier, entre autres Th. De Banville, F. Coppée, Th. Gautier, L. Halévy, A. de Musset, Sully-Prudhomme, et jusqu’au redoutable L. Veuillot ! A Paris, ses chansons étaient programmées aux spectacles de l’Alcazar, du Ba-Ta-Clan, de l’Eldorado. Son Opéra-comique de salon « Le Docteur Vieuxtemps » fut joué en présence de Napoléon III et de la princesse Mathilde.

Et même, ensuite, certaines de ses œuvres ont été interprétées par des artistes connus, tels Julos Beaucarne Pierre Bertin, Georges Brassens, Raoul de Godewaersvelde, Armand Mestral…

Gustave Nadaud a jadis figuré dans les « Morceaux Choisis » scolaires. Aujourd’hui, ne serait-il pas souhaitable que les jeunes élèves puissent apprendre quelques-uns de ses meilleurs poèmes : « Le Nid Abandonné », « Le soldat de Marsala », « Les Trois Hussards » par exemple… Encore faudrait-il qu’elles soient rééditées, comme elles le furent en 1957, sous le patronage de la ville de Roubaix, par La Muse de Nadaud…

 

Ecoles de plein-air du Pont rouge

RAPPORT ADMINISTRATIF MUNICIPAL DE 1938
Ecoles Anatole France et Jean Jaurès

HISTORIQUE

Au sortir de l’effroyable tourmente qui, de 1914 à 1918 s’est abattue sur nos malheureuses régions, la forte et laborieuse race du Nord paraissait menacée dans ses forces vives. La population enfantine surtout, débilitée par les privations de toutes sortes, inspirait les plus vives inquiétudes à tous ceux, philanthropes, médecins, administrateurs qui, à un titre quelconque, avaient le souci de l’avenir de la Cité.

« Dans une école de Lille, écrivait alors le professeur Debeyre, lors d’une visite d’hygiène, après la guerre, les médecins qualifiés n’auraient trouvé, sur 240 enfants examinés qu’un seul sujet sain ». Et, dans un opuscule consacré à l’ « Œuvre Antituberculeuse Scolaire à Roubaix », le docteur Dupré note, de son côté, que « dès la libération », « les enquêtes médicales relevaient dans notre population scolaire plus de 80 % de tuberculose au début ». Ces constatations effrayantes ne pouvaient pas ne pas retenir l’attention des autorités compétentes, et tous les hommes de bonne volonté réagirent vigoureusement. Les Comités de ravitaillement, des groupements de bienfaisance français et étrangers mirent bien à la disposition des Administrations communales et hospitalières, les moyens propres à procurer momentanément aux populations anémiées une alimentation plus substantielle que par le passé ; mais ce n’était là qu’un palliatif. Pour lutter avec succès contre cette déficience physiologique constatée de toute part, il fallait engager une action méthodique et continuée.

C’est ce que comprit le docteur Dupré, Adjoint au Maire de la Ville de Roubaix, délégué à l’Instruction publique et à l’hygiène. Pénétré de cette idée, il accentua plus fortement que jamais cette admirable campagne qu’il n’a cessé de mener contre tous les fléaux sociaux et particulièrement contre la tuberculose. Il savait que, privés des soins que leurs parents, retenus à l’usine, ne pouvaient leur donner, logés dans ces habitations exiguës et mal aérées de nos « courées » populeuses, ces enfants «étaient irrémédiablement appelés à grossir le contingent, hélas déjà beaucoup trop nombreux de nos déchets sociaux ».

Et, sans se soucier de la précarité des ressources dont il disposait, certain, d’ailleurs, d’être suivi par ses collègues de la Municipalité, il se mit résolument à l’œuvre. Car à tous ces déshérités de la vie, il voulait non seulement assurer la subsistance quotidienne, mais encore les réconfortants bienfaits du soleil et du grand air.

Dans la banlieue immédiate de sa grande agglomération ouvrière et à l’extrême limite de son territoire communal, la Ville de Roubaix avait à sa disposition de vastes terrains, éloignés des usines, balayés par les vents et baignés de soleil et d’air pur. Le Docteur Dupré décida d’y amener les petits Roubaisiens et mit à leur disposition une surface gazonnée d’une dizaine d’hectares environ. Tous les jeudis après-midi, d’abord ; puis pendant la durée des grandes vacances, tous les enfants des écoles furent invités à venir s’y ébattre sous la surveillance paternelle de quelques uns de leurs maîtres et maîtresses. En août et septembre 1920, on y dénombra jusqu’à 3.400 garçons et filles qui y passaient toute la journée, gratuitement nourris, amusés et surveillés.

Mais une expérience de deux années permit de constater que, si le séjour au grand air avait donné de très satisfaisants résultats chez la plupart des petits colons, il n’en restait pas moins avéré que pour un certain nombre d’entre eux, la durée de cette cure avait été insuffisante. « Nos colonies de vacances convenaient aux écoliers fatigués, surmenés légèrement ou convalescents, mais elles restaient sans effet caractérisé sur les chétifs anémiques, les tuberculeux latents, les lymphatiques porteurs d’adénopathie trachéobronchite ». A cela, un seul remède : prolonger la Colonie de vacances par une Ecole permanente de plein-air.

Les autorités académiques, pressenties, ayant donné leur agrément, le docteur Dupré fit appel à la bonne volonté des instituteurs et institutrices de la Ville qui, au nombre d’une dizaine, vinrent se ranger à ses côtés. En quelques jours, toutes dispositions étaient prises : deux tentes, destinées à abriter les écoliers en cas de pluie, s’élevaient dans l’herbe haute ; quelques fourneaux hâtivement maçonnés et entourés de vieilles planches, pour la préparation des repas ; du matériel usagé, glané çà et là dans les greniers des établissements scolaires de la ville ; des tables sur tréteaux pour servir les repas… et voilà toute l’installation. L’école de plein-air était fondée ! Cela se passait en juin 1921.

A la rentrée d’octobre 1921, 200 garçonnets et autant de fillettes se trouvaient réunis sur les terrains de jeux du Pont-Rouge. Les tentes dressées en juin ayant été emportées une nuit par la bourrasque, on les avait remplacées pendant les vacances, par des baraques de bois, provenant des liquidations de l’Intendance Militaire. Certes, l’installation n’était pas somptueuse, mais au moins, c’était un abri : deux baraquements pour les classes de garçons et de filles ; deux autres pour servir de réfectoire et de cuisine, et un cinquième aménagé en cinéma et, au besoin, en salle d’éducation physique pour les jours de pluie. Les vents soufflaient bien un peu par les portes disjointes : la neige s’infiltrait bien par les fissures béantes ; la pluie perçait parfois le carton bitumé des toitures… Cela n’eut aucune importance et tout le monde s’attela à la besogne, joyeusement, allègrement.

Le grand air pénétrant par toutes les baies constamment ouvertes du côté sud, gonflait les poumons, développait les thorax, hâlait les joues, régénérait les forces anémiées. Et le Docteur qui visitait chaque jour nos petits écoliers, n’eut à soigner au cours de ce premier hiver ni rhumes, ni toux opiniâtres ni bronchites, ni aucune de ces maladies saisonnières qui, durant les froids, dépeuplent si fréquemment nos écoles urbaines.

Six années durant, l’expérience se poursuivit et les résultats obtenus furent admirables. Tout ce petit monde eut tôt fait de s’adapter au nouveau genre de vie auquel il était progressivement entraîné. Car le régime instauré dans nos Ecoles de plein-air, diffère nécessairement de celui qui est appliqué dans nos écoles urbaines. Nous n’avons plus ici les grandes bâtisses à étages, forcément restreintes et encagées, avec leurs cours renfermées. Ici, c’est l’espace, c’est l’air libre. On travaille, on joue, on mange, on se repose au grand air. Et, naturellement, il s’y est établi une discipline différente de celle qu’on est obligé d’imposer sur un terrain étriqué où vivent des centaines d’enfants.

On n’ « impose » pas au Pont-Rouge ; on « entraîne », et le travail et le jeu librement consentis n’en ont que plus d’attraits et, partant, n’en sont que plus fructueux.

C’est durant toute cette période de rude et joyeux labeur que s’élevaient peu à peu, sur un terrain contigu, les bâtiments confortables qui abritent les deux écoles laïques depuis le 1er octobre 1927.

Les nouvelles écoles de plein-air, aux constructions d’un style bien moderne et d’une conception toute à fait neuve, occupent avec leurs cours, préaux, jardins terrains de jeux, etc.… une surface d’environ 4 hectares. Elles sont comprises dans une vaste propriété de 25 hectares, dont le reste est réservé au Centre sportif municipal et aux terrains de jeux des colonies scolaires de vacances.

La façade aux lignes sobres et symétriques, agrémentée d’un double porche vernissé de grès flammés, se dresse en bordure d’une large avenue qui la sépare du pars des sports. Derrière, des galeries couvertes aboutissent à de vastes préaux qui mènent jusqu’aux salles de classe, garçons à droite et filles à gauche. Les deux groupes sont séparés par des bains-douches, à l’arrière desquels se trouvent les cuisines et réfectoires.

Les salles de classe (six par école) sont grandes, parfaitement éclairées et pourvues d’un système moderne d’aération et de ventilation. En un tour de main, les immenses baies vitrées qui occupent toute la façade sud, mues par un mécanisme spécial, s’ouvrent sans fatigue et font pénétrer à flot l’air du dehors. En outre, des bouches d’aération, placées derrière les radiateurs du chauffage central, entretiennent une ventilation constante et automatique : l’air vicié entraîné par les carreaux perforés des galeries-vestibules est rejeté au-dehors par un ventilateur électrique.

A chaque salle de classe est aménagé un lavabo-vestiaire, pourvu de robinets distribuant à volonté l’eau froide ou chaude ; une petite armoire métallique par élève, avec support mobile pour la serviette éponge et casier spécial pour la brosse à dents, la pâte dentifrice et le gobelet émaillé, vient compléter l’ameublement de cette pièce. Enfin, un gros tuyau de chauffage, passant au-dessous de ces armoires-vestiaires permet le séchage rapide des serviettes et effets qui y sont disposés ; ici encore, un large système d’aération entraîne au-dehors, toutes les vapeurs malsaines ou désagréables qui pourraient s’y former.

Nous ajouterons que les murs recouverts de peinture claire, les parquets en terraplane rouge ciré, les armoires et bureaux en chêne naturel verni, les tables-pupitres individuelles légères et élégantes, quelques plantes vertes sur les armoires, tout confort à flatter l’œil et cultiver le goût.

Un mot encore : l’entretien de nos locaux, classes, vestibules, etc.…, se fait au moyen d’aspirateurs de poussières et de cireuses qui fonctionnent à l’aide du courant électrique. Donc, ni poussières, ni germes dangereux susceptibles de propager des maladies infectieuses quelconques.

Les bains-douches installés dans une grande salle comportent quatre-vingt-dix cabines de déshabillage, trente cabines à douches et trois salles de bains à l’usage des enfants qui demandent des soins spéciaux. Les parquets et parois des cabines, recouverts de granito multicolore, se prêtent parfaitement au nettoyage à grande eau, grâce à des tuyaux et lance d’arrosages prévus à cet effet. Les cuisines et réfectoires sont parquetés en granito et également pourvus à profusion de lumière et de grand air. Les W.C. sont au nombre de dix-huit par école.

Dans les bâtiments d’administration occupant toute la façade, ont été aménagés dans salles d’attentes, le cabinet de consultation du Docteur, une infirmerie avec matériel « ad hoc » et une salle pour la projection des rayons ultra-violets.

Deux terrains de jeux clôturés, d’un hectare chacun, sont à la disposition des garçons et des filles qui, durant la belle saison, y prennent toutes leurs récréations. La cure de soleil et la radiothérapie (rayons ultra-violets) sont assurées, la première soit sur une large terrasse surplombant les bâtiments soit sur les pelouses des terrains de jeux ; la seconde, dans la salle spéciale signée plus haut.

Toutes ces installations sont entourées de cours de récréation plantées d’arbres, de pelouses et de jardins fleuris et ombragés, donnant à cet ensemble une si parfaite harmonie de tons et de couleurs que l’on s’y sent heureux de vivre.

RECRUTEMENT

Le recrutement est assuré par l’Inspection médicale des écoles. Deux fois par an, en octobre et en mars, les médecins-inspecteurs recherchent dans les écoles de la ville les enfants souffreteux, les débiles, les malingres, les ganglionnaires et tous ceux dont la croissance a été arrêtée par le rachitisme ou que des tares héréditaires prédisposent à la contagion bacillaire. Ces sujets menacés, mais non contaminés, viennent remplacer, en ces deux périodes de l’année, ceux que le soleil et le grand air ont rétabli et qui sont renvoyés dans leurs écoles respectives.

Au cours de l’année scolaire, il nous arrive encore de recevoir de nouveaux élèves. Mais c’est là un recrutement exceptionnel ; il s’applique aux sujets dont l’état de santé, au moment de l’examen médical n’avait pas retenu l’attention du praticien ou à ceux qui, ayant été dépistés par les infirmières visiteuses de notre Dispensaire d’hygiène, nous sont envoyés par le docteur, directeur du bureau.

 ORGANISATION PEDAGOGIQUE

 • Classement des élèves

Dès leur arrivée à l’Ecole de plein-air et après examen pédagogique sommaire les enfants sont répartis dans les différentes classes où les maîtres les examinent à loisir pendant quelques jours. C’est alors seulement qu’ils sont affectés définitivement aux cours qui leur conviennent. Et il se produit nécessairement ce fait, que des enfants de 9 ans se trouvent placés au cours moyen, alors que d’autres de 10 et même 12 ans suivent les exercices du cours préparatoire. Ceci s’explique aisément : les écoles de plein-air ne sont un refuge ni pour anormaux, ni pour déséquilibrés intellectuels ; mais il arrive  très souvent que, du fait de leur état de santé, les enfants qu’elles reçoivent ont fréquenté l’école irrégulièrement. Il en est résulté pour eux un sérieux retard dans le développement de leurs études ; c’est pourquoi on s’efforce toujours de constituer des classes aussi homogènes que possible, en plaçant dans un même cours, tous les enfants dont le développement intellectuel est à peu près de même niveau, quel que soit leur âge.

Programme et emploi du temps

Les programmes ont été déterminés d’après les données générales enseignées dans nos écoles primaires. Sans doute, on en a élagué tout ce qui n’est pas absolument indispensable, mais on a tenu, néanmoins, à rester en contact avec l’école d’origine. Comme le séjour en plein air n’est que momentané, et que les enfants arrivent à n’importe quel âge de leur scolarité, il faut qu’au moment de leur rentrée dans leurs classes respectives, ils puissent suivre les mêmes exercices intellectuels que leurs camarades. L’emploi du temps journalier a été conçu de façon à concilier les intérêts de l’éducation morale et intellectuelle avec les nécessités de l’éducation physique.

 • Méthodes et procédés

Tout enfant admis au Pont-Rouge est pesé, mesuré. Son poids, sa taille, son périmètre thoracique, son élasticité respiratoire, sont notés avec soin sur la fiche médicale qui lui est attribuée. Cette fiche constamment tenue à jour comprend avec l’état signalétique de l’enfant :

 1° Le diagnostic du docteur et, s’il y a lieu, le traitement à appliquer (rayons ultra-violets, gymnastique médicale, soins spéciaux, etc.…) ; l’emplacement nécessaire pour y consigner les résultats obtenus après traitement.

2° Silhouettes qui, le cas échéant, permettront d’indiquer avec précision les déviations ou déformations du corps.

3° Un tableau des mensurations trimestrielles à effectuer, et diverses observations relatives à l’état des yeux, du nez, de la gorge, etc.…

4° Un tableau destiné à faciliter le pointage des séances de gymnastique médicale et de projection des rayons ultra-violets.

Quant aux exercices physiques, ils figurent à la place d’honneur dans notre horaire journalier et sont réalisés, d’abord sous forme de leçon proprement dite, puis de jeux libres ou jeux dirigés avec appareils divers : ballons, quilles cerceaux, etc.… Nous aurons donné une idée de l’importance que nous leur attribuons quand on saura qu’il leur est consacré 1 heure le matin et 1 heure 30 l’après-midi. Dirigés par un professeur spécial, ils sont parfaitement appropriés à l’âge et au tempérament de nos enfants. Pas de positions rigides, pas de muscles raidis, pas d’automatisme, pas de contrainte. On joue, on court, on saute avec mesure. On s’assouplit.

• Résultats acquis

Depuis la création de nos écoles de plein-air, c’est à dire depuis juin 1921, un peu plus de quatre mille enfants (garçons et filles) sont passé par le Pont-Rouge. Les uns y sont restés 3 mois, d’autres 6 mois et quelques-uns y ont fait un stage d’une année et même plus. Rentrés dans leurs écoles respectives, dispos et aptes au travail intellectuel ils ont pu suivre facilement les exercices et leçons du contingent qu’ils avaient quitté pour aller au plein-air. Nombreux sont ceux d’entre eux qui ont alors suivi les cours du certificat d’études primaires, et ont été admis à l’examen. Cela prouve suffisamment que ces enfants n’ont pas été retardés par leur séjour ici, malgré la réduction des heures consacrées aux exercices purement scolaires.

Quelques enfants ayant terminé leur scolarité au plein-air sont entrés en apprentissage suffisamment fortifiés pour résister aux fatigues toujours un peu déprimantes de l’atelier ; Et fait caractéristique, il ne se passe pas de semaine sans que l’un ou l’autre d’entre eux ne profitent de la semaine anglaise appliquée dans de nombreux ateliers, pour venir passer le samedi après-midi avec leurs anciens maîtres, s’asseoir à côté de leurs jeunes camarades et se livrer ensuite à de joyeux ébats sur notre terrain de jeux. Les résultats physiques sont excellents :

1° L’état général est en amélioration très sensible chez tous nos écoliers sans exception ;

2° Les enfants anémiés retrouvent rapidement leur vitalité perdue ; ils reprennent goût au mouvement et leur croissance en est activée ;

3° Les pré tuberculeux, les ganglionnaires, ceux dont les bronches sont faibles augmentent en peu de temps leur capacité thoracique (en un mois, l’indice respiratoire d’un enfant de cette catégorie est passé de 3,5 à 7,5) et leur poids s’améliore ;

4° Chez les petits, la tendance à l’obésité due au mauvais régime alimentaire disparaît dans une proportion de 50 % environ ;

5° Enfin, l’application des rayons ultra-violets a donné des résultats très satisfaisants dans le traitement du rachitisme et des maladies cutanées.

Il apparaît d’une façon bien nette que tous nos élèves, du plus petit au plus grand, ont gagné progressivement en poids, taille, périmètre thoracique etc. ; les rachitiques même, ceux-là surtout, ont profité de leur séjour ici, car nous n’avons plus dans nos classes, aucun enfant véritablement frappé de croissance.

En résumé, les enfants qui ont fréquenté les écoles de plein-air, en ont retiré de multiples bénéfices : leur poids s’est accru, leur taille s’est parfois redressée, leur développement physique s’est accéléré ; ils sont plus résistants aux variations de température, ils ont acquis de bonnes habitudes d’hygiène et leurs études ont été, par la suite, au moins aussi solides et aussi rapides que celles de leurs camarades restés à l’école urbaine.

COLONIE SCOLAIRE DE VACANCES

 • Situation

Aux confins de Roubaix, au Pont-Rouge, à 3 kilomètres du centre, au point le plus aéré de la ville nous disposons d’un vaste terrain de plus de 130.000 mètres carrés, éloigné de toute habitation balayé par les vents, l’on y respire librement un air vif débarrassé de toutes les poussières urbaines. Cette enceinte assainie par le berceau de verdures de la campagne environnante, agrémentée de vertes pelouses réalise toutes les conditions les plus favorables à la santé, à la joie et à la vie.

 • Organisation

Des jeux de toutes sortes avec pistes d’entraînement, terrains de football, sautoirs, balançoires, portiques, manèges, jeux de tennis et de croquet, basket-ball, etc. sont mis à la disposition des enfants.

De vastes bâtiments de dimensions harmonieuses et d’un aspect riant, abritent les services de cuisine, réfectoires, abris et dépendances, le tout est complété par une superbe salle de spectacle, pouvant accueillir 3.000 enfants à chaque séance. Nos enfants furent d’abord conduits au terrain chaque jeudi par leurs maîtres. Notre vaste société scolaire, dès lors constituée par statuts et comprenant plus de 6.000 enfants, fut conviée dès le début du mois d’août 1920 à notre terrain de sports. Puis il fut décidé d’organiser pendant les mois d’août et de septembre, une véritable colonie scolaire ouverte à tous les enfants de Roubaix sans distinction. Chaque matin, les enfants, garçons et filles, rassemblés par groupes dans une école de leurs quartiers respectifs, sont conduits au terrain, sous la surveillance d’instituteurs et d’institutrices délégués à cet effet, et de moniteurs de culture physique.

 • Programme

Le programme de nos colonies scolaires est avant tout un programme d’éducation physique. L’horaire quotidien, établi méthodiquement, y prévoit une large part aux jeux de toutes sortes précédemment indiqués qui constituent la partie essentielle de l’emploi du temps : il s’agit surtout d’amuser nos enfants et de les attirer nombreux à la colonie. Pour délasser les membres un peu fatigués par l’entraînement physique, et pour ne pas abandonner nos écoliers à l’inactivité, notre horaire prévoit des causeries appropriées faites par les maîtres qui ne perdent pas de vue l’éducation morale de nos enfants.

Enfin, pour compléter cette œuvre prophylactique, la Municipalité a pris à sa charge l’alimentation de tout notre petit monde. Des repas complets copieux et abondants à midi, un petit déjeuner à 10 heures et un goûter à 4 heures sont servis en plein air, lorsque le temps le permet ou dans de vastes réfectoires aménagés à cet effet, pour les jours de pluie.

 • Budget

Chaque année, avant guerre, était inscrite au budget une somme de 40.000 francs, destinée aux frais de séjour d’un nombre relativement restreint d’enfants dans un sanatorium salin. L’augmentation des prix de pension ne permettait plus pour un crédit aussi modique d’envoyer un nombre suffisant d’enfants. Par contre le nombre de ceux appelés à bénéficier du régime de plein-air s’est accru dans des proportions effrayantes ; c’est par milliers et non par centaines qu’il faut maintenant les compter.

Et c’est là surtout que réside l’intérêt primordial de l’œuvre : elle atteint la grande masse de notre population enfantine, en évitant de l’éloigner de la famille. Le crédit de 40.000 francs assura le fonctionnement du début ; il subit des augmentations successives, pour atteindre en 1938 la somme de 318.000 francs.

 

 RAPPORT DE M. LEANDRE DUPRE AU CONSEIL MUNICIPAL

DU 30 DECEMBRE 1921

CREATION DE DEUX ECOLES DE PLEIN AIR

 

« Messieurs,

de l’examen médical des enfants, pratiqué dans les école après la libération, il résultait que presque tous étaient fortement débilités par les ravages de l’occupation, chez plus de 80 %, on constatait des signes de tuberculose au début. Consciente du péril à conjurer se faisant l’écho du cri d’alarme jeté d’ailleurs par tous les médecins et qui a retenti dans le cœur de tous les français l’Administration municipale mit tout en œuvre pour enrayer le mal et refaire la santé chancelante des enfants d’âge scolaire.

Le développement de nos cantines scolaires avec repas de suralimentation, les exercices quotidiens de culture physique ordonnés et méthodiques, la création de nos colonies scolaires l’extension de nos colonies de vacances, tous ces moyens thérapeutiques qui nous avaient permis de toucher la grande masse, ont donné incontestablement des résultats indéniables. Il restait néanmoins tout un lot de « tout petits » léchés par la bacillose et repérés dans les écoles par les médecins-inspecteurs et pour lequel le séjour au grand air n’avait guère été suffisamment prolongé. Nous avons pensé que l’air confiné des salles de classe, les clapiers et les véritables fourmilières dans lesquels certains vivaient ne pouvaient qu’aggraver leur situation.

C’est alors que nous fîmes installer à notre terrain de sports du Pont-Rouge, des baraquements tout à fait confortables, divisés par des cloisons et dont un côté exposé au midi, est constamment ouvert. On s’est d’ailleurs conformé strictement à la réglementation des écoles de plein air si judicieusement conçue. En outre, des instituteurs et institutrices, un moniteur de culture physique est attaché à nos écoles et ne cesse de faire, par roulement, aux différentes classes, des exercices de culture physique. Il serait oiseux de nous étendre sur le fonctionnement. Les programmes et l’emploi du temps de nos écoles. Les méthodes d’enseignement et d’hygiène les plus modernes y sont appliquées.

Il s’agit là d’un problème de prophylaxie sociale qui est appelé à rendre à notre population scolaire les plus signalés services. C’est pénétré de cette vérité, qu’à Roubaix nous avons voulu, dès avril dernier être des novateurs en la matière. Ouvertes à notre terrain du Pont-Rouge nos écoles, qui comptent 400 élèves, ont donné déjà les plus brillants résultats.

Elles répondent tellement à une nécessité, elles sont tellement entrées dans nos mœurs, que malgré la rigueur de la température du début du mois, le relevé de notre contingent scolaire nous a permis de constater que l’effectif du Pont-Rouge était le plus complet. Pas ou presque pas d’absences malgré la distance et les intempéries.

Nous tenons, en passant, à témoigner l’expression de toute notre gratitude à la compagnie des Tramways qui, convaincue de l’efficacité de l’effort, a bien voulu mettre, gracieusement à la disposition des « tout petits », pour l’aller et le retour, une de ses voitures.

Toutes les familles sont maintenant édifiées sur les bienfaits de notre œuvre qui procure à nos petits déshérités les joies fortifiantes de la vie au grand air. Tous se sont adaptés aisément, et cela au grand bénéfice de leur santé, à nos écoles de plein air et on peut affirmer que les excellents résultats constatés, assurant à l’écolier, véritablement atteint dans sa vigueur respiratoire, un retour intégral à la santé sans interrompre le cours normal –et nous insistons sur ce point- de ses études, sauvera un grand nombre de nos petits Roubaisiens de l’emprise définitive de la tuberculose.

Nos écoles en fait leurs preuves, l’expérience a réussi pleinement, l’exemple est tout à fait probant et les résultats dépassent tout ce qu’il était permis d’espérer. (…) »

Les hautes écoles

Parmi les droits et devoirs de toute municipalité l’enseignement tient une place importante. Le développement de la ville devait créer pour les autorités roubaisiennes un ensemble de problèmes que les Conseils municipaux successifs s’efforcèrent de solutionner dans les meilleures conditions. Nous essayerons de faire le point de ce qui existait en 1893. Rappelons qu’à cette époque, les garçons et les filles sont strictement séparés sauf dans les écoles maternelles.

Les jeunes Roubaisiens de 1893 disposent alors des établissements suivants que nous citons en commençant par les écoles supérieures.

Ecole nationale des Arts Industriels de Roubaix

Située place Chevreul, elle a été créée en vertu d’une loi du 5 août 1881. Elle est dirigée par un Conseil Supérieur dont le Préfet du Nord, le maire de Roubaix et le président de la Chambre de Commerce de Roubaix sont membres de droit. A cet établissement sont rattachés une bibliothèque, une collection d’échantillons et un musée.

 Institut Turgot

C’est un établissement d’enseignement primaire supérieur pour garçons installé rue de Soubise sur un terrain acheté le 12 avril 1873. Au départ, les bâtiments furent d’abord utilisés pour une école de filles, un asile et une crèche. En 1884, la ville décida d’y installer une école primaire supérieure qu’elle appela Institut Turgot. Ce n’est qu’en 1908 que la municipalité décida d’adjoindre à cet établissement, transféré alors rue du Collège, une école de commerce et d’industrie. L’Institut Turgot comptait 454 élèves en 1893.

 Institut Sévigné

Cet établissement primaire supérieur des filles fut installé dans un immeuble dont l’hospice de Roubaix avait la jouissance selon un bail de 99 ans, commençant en 1825. Le 1er août 1881 la ville racheta les bâtiments qui furent complétés par une construction en 1890. L’Institut Sévigné comptait 307 élèves en 1893.

Ecoles élémentaires pour garçons.

Elles sont au nombre de 14 accueillant 7 217 élèves. Nous les énumérons en fonction de leur localisation :

 • Rue Archimède : Le terrain fut acheté le 21 novembre 1879 et la construction réalisée en 1881. En 1893 on y dénombrait 480 élèves. Directeur : Monsieur Lerat.

• Rue des Arts : Les terrains appartenaient au Bureau de Bienfaisance. Une partie fut cédée au département pour la construction d’une caserne de gendarmerie et le reste acheté par la ville pour y construire une école dont les travaux commencèrent en 1883. Il y avait 487 élèves ; Directeur : Monsieur Gautier.

• Rue du Bois : Construite en 1865 sur les terrains acquis en novembre et décembre 1863. Agrandie en 1873, 403 élèves ; directeur Monsieur Glaise.

• Rue Brézin : Le terrain fut donné à la ville le 6 août 1870. Les travaux commencèrent en 1876. 546 élèves ; directeur : Monsieur Faidherbe.

• Boulevard d’Halluin : Louée en 1877 par la ville à la société en participation de Monsieur Mollins. Elle fut achetée en 1878, 461 élèves ; directeur Monsieur François.

• Rue Decrême : Bâtie en 1858 sur un terrain donné à la ville par Madame Veuve Delaoutre fille d’Alexandre Decrême dont la rue porte le nom. Agrandie en 1877, 519 élèves ; directeur Monsieur Harcqz.

• Rue Delezenne : Bâtie sur un terrain acheté en 1872. Construite en 1873, 461 élèves, directeur Monsieur Somain.

• Rue du général Chanzy : Construite sur le même terrain que l’école de la rue du Moulin acheté par la ville en 1854 ; 94 élèves ; directeur Monsieur Estrabant.

• Rue d’Hem : D’abord louée par la ville par la société de Mollins. Elle fut achetée le 28 juin 1878, 418 élèves ; directeur Monsieur Dupret.

• Rue Montaigne : Le terrain fut acquis le 17 juillet 1880 et les travaux réalisés en 1881 ; 493 élèves ; directeur Monsieur Roegaux.

 • Rue du Moulin : Construite en 1867 sur l’emplacement de l’ancien hôpital qui avait été lui-même installé dans une ancienne filature dès 1847. L’immeuble avait été acheté par la ville le 8 mai 1854, 537 élèves, directeur Monsieur Dazin.

• Rue Pierre de Roubaix : Construite par une société en participation, elle fut d’abord louée par la ville en 1877 et achetée par celle-ci le 28 juin 1878, 752 élèves, directeur Monsieur Leroy.

• Rue Saint Vincent de Paul : Erigée en 1862 sur des terrains acquis le 29 novembre 1851, 426 élèves ; directeur Monsieur Crinon.

• Rue Ternaux : Les terrains furent achetés le 15 septembre 1864 et un échange partiel avec un propriétaire voisin permit une meilleure orientation de cette école dont l’entrée était d’abord prévue rue de la Paix, 551 élèves ; directeur : Monsieur Isauré.

• Rue Turgot : Construite par la Compagnie Desclée qui alimentait la ville en gaz d’éclairage, elle fut cédée à la Municipalité le 29 juin 1869 en échange d’un tronçon de rue qui traversait l’usine, 643 élèves, directeur : Monsieur Gaillard.

 Toutes ces écoles, sauf celles rue Archimède et Decrême organisaient des cours pour adultes qui étaient fréquentés en 1893 par 828 élèves.

 Ecoles élémentaires pour filles.

On en compte 12, recevant 4474 élèves

 • Rue des Anges : Les terrains furent achetés en septembre 1872 et les travaux débutèrent en 1876, 620 élèves ; directrice : Mademoiselle Baurain.

 • Rue du Coq Français : Louée à la société de Mollins en 1877, elle fut achetée en 1878, 415 élèves ; directrice : Madame Chevaucherie.

 • Rue du général Chanzy : Même terrain que celui de l’école de la rue du Moulin, 101 élèves ; Directrice : Mademoiselle Roussiez.

 • Rue de l’Hommelet : Construite en même temps que l’école de garçons de la rue Ternaux sur des terrains acquis en 1864, 507 élèves ; directrice : Madame Pfanmatter.

 • Rue de Naples : Le terrain fut acheté par adjudication publique le 30 septembre 1880. La construction fut réalisée en 1881, 265 élèves ; Directrice : Madame Velu.

 • Rue du Pile : Erigée par la société de Mollins, elle fut louée en 1877 par la ville pour être achetée en 1878 ; 362 élèves ; directrice mademoiselle Detille.

 • Rue Pellart : Le terrain fut donné par Madame Lefebvre-Ducateau le 2 novembre 1867. En 1893, elle est dirigée par des religieuses bien que rentrant dans la catégorie des écoles communales. Elle compte 275 élèves ; Directrice Sœur Darqué.

 • Rue Olivier de Serres : elle avait été construite par la Société en participation de Mollins. Louée par la ville en 1877 et achetée en 1878, 345 élèves ; Directrice Mademoiselle Christians.

 • Rue de Soubise : Construite en 1880 sur un terrain acheté le 24 juin 1845, 127 élèves Directrice Madame Obin.

 • Rue Saint Antoine : Construite en 1845 sur un terrain donné à la ville par Madame Delaoutre, agrandie en 1863 et 1868, 620 élèves ; Directrice Madame Vilbert.

 • Rue Saint Vincent de Paul : Construite sur des terrains achetés par la ville le 20 novembre 1861, ouverte en 1863, agrandie en 1875. En fait son entrée était située rue de Blanchemaille, 432 élèves ; Directrice Madame Detille.

 Les écoles maternelles

Parfois attenantes aux écoles de filles, elles accueillaient les enfants trop jeunes pour fréquenter les écoles primaires. On en comptait 12 :

 rue des Anges,

 • rue de Blanchemaille,

 • rue de Condé,

 • rue de Flandre,

 • rue de l’Industrie,

 • rue de l’Hommelet,

 • rue Pascal,

 • rue de Rome,

 • rue Pierre de Roubaix,

 • rue Sainte Elisabeth,

 • boulevard de Strasbourg,

 • rue Watt.

 En 1893, elles avaient reçu 4538 enfants dont 2283 garçons et 2255 filles.

Des cours de coupe, couture et assemblage étaient donnés dans 8 écoles de filles. On y comptait en 1893, 1612 élèves. Un diplôme de coupe pouvait être obtenu en fin d’année scolaire. 82 jeunes filles s’y étaient présentées en 1893 et 67 avaient obtenu le diplôme.

Des cours communaux du soir étaient organisés pour les enfants travaillant dans les manufactures dans deux écoles de garçons : rue Decrême et rue Brézin et dans quatre écoles de filles : rue Olivier de Serres, rue des Anges, rue Sainte Elisabeth et rue Saint Vincent de Paul.

 L’enseignement privé

Il était également très bien représenté. L’institution libre de Notre-Dame des Victoires qui avait déménagé ses locaux de la rue du collège en 1893 pour s’installer rue Notre-Dame des Victoires accueillait 485 élèves. Son directeur était Monsieur l’abbé Chabé.

Les écoles primaires d’enseignement privé pour garçons étaient au nombre de 8 dont une école libre laïque située rue Bell qui recevaient 407 élèves et 7 écoles libres catholiques dirigées par les Frères des Ecoles Chrétiennes installées : rue du Tilleul (actuellement rue Jules Guesde) avec 541 élèves ; rue de la Paix, 407 élèves ; rue d’Alsace : 420 élèves ; rue Rollin : 412 élèves ; rue Bourdaloue : 424 élèves ; boulevard de Strasbourg : 396 élèves et rue de Crouy : 170 élèves.

Pour les filles, 20 écoles privées ayant presque toutes des classes maternelles recevaient les enfants roubaisiens. Elles étaient toutes dirigées par des religieuses.

Ecole des Sœurs de la Sagesse : boulevard de Mulhouse, 395 élèves ; rue de la Sagesse : 168 élèves ; rue Pigalle : 195 élèves ; rue du général Chanzy : 154 élèves ; rue de la Redoute : 167 élèves ; rue Pellart prolongée : 91 élèves ; rue Sainte Elisabeth : 762 élèves ; place Sainte Elisabeth : 142 élèves ; rue d’Inkerman : 447 élèves ; rue de la Chaussée : 429 élèves ; rue Saint Louis : 520 élèves  et rue Richelieu 70 élèves.

Ecoles des Dames de la Sainte Union ; rue du Vieil Abreuvoir : 165 élèves ; rue de l’Espérance : 58 élèves ; rue du Collège : 23 élèves ; rue Salomon de Caus : 67 élèves et rue des Fabricants : 25 élèves.

Ecole des Sœurs Clarisses : rue de Wasquehal : 308 élèves.

Ecole des Sœurs Carmélites : 593 élèves.

A ces chiffres qui sont ceux des élèves de l’enseignement primaire s’ajoutaient 3825 élèves (1708 garçons et 2177 filles) fréquentant les classes maternelles de ces différentes écoles privées de filles.

 

Telle est la physionomie scolaire de Roubaix il y a cent ans, une organisation importante accueillant des milliers d’enfants de tous âges, s’efforçant de leur inculquer le savoir et l’éducation afin de leur permettre d’affronter les difficultés de l’existence. C’était l’école de nos grands-parents.

Edmond Derreumaux

Président de la Société d’Emulation de 1993 à 1996

L’école Blaise Pascal

Au cours du 19e siècle, l’éducation des enfants devient peu à peu une préoccupation majeure de la société française. A Roubaix, la construction de nos écoles jalonne l’histoire de notre ville et l’éducation de nos jeunes Roubaisiens devient un souci constant pour les municipalités successives.

Cette nouvelle rubrique nous emmènera flâner à travers la ville sur les traces de ces bâtiments qui ont tant marqué la jeunesse de nos concitoyens.

Arrêtons-nous cette fois-ci rue des Anges, devant l’école Blaise Pascal. Malgré les nombreux aménagements et la disparition des jardins, les trois bâtiments primitifs ont été préservés et forment aujourd’hui encore, un très bel ensemble d’architecture scolaire, fonctionnel et hygiéniste, de la fin du 19e siècle.

Son histoire commence par un rapport de la Commission des Ecoles qui constate l’absence de lieux scolaires dans le quartier du Fontenoy. Pour y remédier, la municipalité roubaisienne achète en 1872 à Monsieur Flipo-Meurisse, un terrain d’une superficie de 2.770 m², situé entre la rue des Anges et de la Guinguette. Jusque-là, les enfants pouvaient aller à l’école de la rue Turgot qui était assez éloignée. Les parents hésitaient souvent à les y envoyer car les chemins étaient difficiles et peu praticables notamment en hiver. A cette époque, la ville de Roubaix est confrontée à deux problèmes qui ralentissent la scolarisation des enfants. D’une part, l’importance de sa croissance démographique nécessite la construction de nouveaux groupes scolaires. Or, les moyens de financement n’existent pas. Il faut attendre 1870 pour que la ville de Roubaix soit autorisée par l’Etat à prélever des taxes d’octroi sur certains produits entrant dans la ville. D’autre part, il faut inciter les familles à envoyer leurs enfants à l’école car si celle-ci est gratuite, elle n’est pas encore obligatoire.

Un premier projet est établi. La Commission des Ecoles Publiques, après avis du Conseil Académique qui demande certaines modifications, visite le groupe scolaire de la rue de Soubise, présenté comme le type même des nouvelles écoles à construire à Roubaix et dont les plans sont approuvés par la Commission Départementale des Bâtiments Civils. La Commission demande alors au Conseil Municipal de Roubaix, d’abandonner ce premier projet « d’une part, la hauteur présente des inconvénients graves en temps ordinaire et surtout en cas d’incendie et d’autre part qu’il ne convient pas d’agglomérer sur un même point une aussi grande quantité d’enfants et qu’il est préférable de construire un plus grand nombre d’écoles plus petites, même si la dépense doit en être augmentée, de manière à donner aux familles toute possibilité d’y envoyer leurs enfants et à placer ces enfants eux-mêmes dans des conditions plus hygiéniques. » (AM Rx MIVc7 – Commission des Ecoles Publiques, rapporteur M. Leclercq-Mulliez)

Le second projet est mené par J. Bte Godey, Directeur des Travaux de la Ville de Roubaix puis Henri Deniau, son successeur. Il concerne la construction de deux écoles avec le même budget. L’une, située rue des Anges, comprend une école, un asile, une crèche et un bâtiment d’habitation pour douze institutrices religieuses et une école de garçons, rue de Brézin, avec une maison d’habitation pour un directeur laïc.

La façade principale rue des Anges déploie une belle symétrie sur 49 mètres de large. Les deux bâtiments en front à rue, sur trois niveaux d’élévation, sont agrémentés de superbes frontons représentant les armes de la ville entourées des symboles de l’instruction. L’habitation des institutrices est conçue pour une communauté religieuse. L’entrée à gauche donne sur un large couloir qui mène au parloir, une salle de travail, l’escalier et une grande cuisine avec une relaverie, puis un grand réfectoire. A l’étage la disposition est la même mais on y trouve l’infirmerie, une salle d’exercice, un dortoir pour 12 sœurs, une chambre pour la mère supérieure et une lingerie. Un jardin de 140 m² complète l’organisation de l’habitation.

La crèche dont l’entrée se fait par l’allée de droite comprend un corridor, une grande cuisine, le pouponnat avec la pharmacie et des lavabos, un large escalier, un petit parloir, une salle d’allaitement, une salle des berceaux pour 24 enfants et le jardin pourvu d’une galerie permettant de sortir les enfants à l’ombre. A l’étage se situent un dortoir pour quatre bonnes, un grand ouvroir et une lingerie. Les deux bâtiments ont des caves pourvues chacune d’une grande citerne qui récupèrent les eaux de pluie utilisées pour le lavage des locaux et du linge.

L’asile (Ecole maternelle) est au rez-de-chaussée du bâtiment arrière. Il est composé de deux grandes salles, largement éclairées et aérées par de larges et hautes baies de part et d’autre du bâtiment. Elles sont munies, suivant l’usage de l’époque, de gradins, de bancs et de portemanteaux. L’école comprend six classes au premier étage. Elles sont prévues pour 50 élèves, au plus 58 grâce aux nouvelles tables à deux élèves adoptées récemment par l’administration municipale. Très hautes de plafond pour donner un volume d’air suffisant à chaque élève, elles sont munies de nombreuses baies sur les deux façades ce qui donne d’excellentes conditions d’aération et d’éclairage bénéfique à la santé des élèves. Les galeries métalliques, soutenues par de fines et harmonieuses colonnes superposées en fonte courent le long de la façade et permettent une bonne circulation des élèves tout en protégeant des intempéries.

Les cours de récréation sont entourées de trottoirs. Elles sont pavées et plantées d’arbres ce qui permet aux élèves de s’ébattre agréablement au grand air.

On ne peut qu’être impressionné ici par le soin apporté à la construction, le souci de la qualité des matériaux, la fonctionnalité rationnelle des bâtiments mais aussi tout le processus de réflexion sur l’hygiène et le bien-être des élèves qui en fait un modèle éducatif de modernité et de mieux être social de cette époque.

Le groupe scolaire de la rue des Anges ouvre le 9 avril 1877. En 1882, les écoles publiques de filles de Roubaix sont laïcisées. Leur maison est transformée en appartements pour les directrices de l’école primaire et de l’école maternelle.

L’école est un lieu d’apprentissage et répond aux besoins spécifiques des habitants du quartier. Des cours communaux du soir sont organisés de 18 à 19 heures 30 pour les enfants des manufactures tous les jours sauf les lundi et jeudi. Un cours de coupe, de couture et d’assemblage fonctionne les mardi, mercredi et jeudi de 19 à 21 heures pour les jeunes filles intéressées après leur travail.

Marie-Thérèse DECLERCQ (1925 – 2006) : « La Dame des Anges »

Née le 10 août 1925 à Roubaix, Marie-Thérèse Declercq entre à l’Ecole Normale de Douai où elle suit la formation professionnelle pour devenir institutrice de 1947 à 1948. Elle est ensuite nommée institutrice à l’école maternelle de la rue des Anges dans ce quartier ouvrier de Roubaix où elle enseigne à des enfants essentiellement issus de l’immigration. Elle y deviendra directrice de l’école maternelle de 1954 à 1959. Dès le début de sa carrière, elle aura à cœur de défendre les enseignants mais aussi les élèves. Son action auprès des enfants lui vaudra d’ailleurs le surnom de « Dame des Anges » par un père d’élève d’origine algérienne.

Tout au long de ces années, elle aura l’occasion de prouver tout son intérêt pour l’Ecole publique et c’est cette conviction pour la défense de la laïcité qui l’amènera tout naturellement à s’investir dans le syndicat national des instituteurs (SNI) dès 1950, elle avait alors 25 ans. C’est en 1959 que son engagement pour le service public de l’Education nationale prendra tout son ampleur notamment lorsqu’elle choisira de s’investir dans le secteur social. C’est ainsi qu’elle est mise à disposition pour la section MGEN de Lille et devient directrice adjointe en septembre 1959. Dans le même temps, elle entreprend une formation d’assistante sociale qu’elle réussira brillamment ce qui lui permettra de créer à la section MGEN du Nord le « Service social secteur Nord » puis le « Service d’aide ménagère ».

Mais son engagement ne s’arrêtera pas là. Femme de conviction, elle mettra son militantisme au service de l’ADOSEN du Nord (à l’époque Association des donneurs de sang de l’Education nationale) ainsi qu’à la section APAJH du Nord (Association pour les jeunes en situation de handicap). Elue au conseil d’administration national de la MGEN de 1967 à 1977 elle deviendra responsable du service social du siège national de 1970 à 1977. Elle consacrera également son temps à s’occuper de personnes en situation de handicap dans l’établissement MGEN de la Ménaudière.

Le 28 juillet 1971, le Ministère de l’Education nationale reconnaîtra ses mérites et récompensera son engagement social en la nommant « Chevalier dans l’Ordre des Palmes académiques ».

Elle quitte Paris et réintègre le département du Nord en septembre 1977 pour se rapprocher et s’occuper de ses parents malades et se verra confier la direction du futur « Centre de santé mentale » de Lille qui ouvrira en mai 1978. Elle en assurera la direction jusqu’en 1983, date à laquelle elle fera valoir ses droits à la retraite.

Marie-Thérèse Declercq s’éteint le 14 janvier 2006. Une foule nombreuse de sympathisants MGEN et de l’Education nationale viennent rendre le 20 janvier dernier un dernier hommage à celle qui laisse derrière elle le souvenir d’une militante généreuse et tolérante dont le seul souci était le bien-être des autres.

Sources :

Archives personnelles de la famille Michel et Francine Declercq – Roubaix

Martine Dromby, Directrice de la section MGEN du Nord, Animatrice Nationale

Archives de la Société d’Emulation de Roubaix

Le monde associatif

A une époque où il n’y a ni radio ni télévision, où la plupart des gens n’ont d’autre moyen de locomotion que leurs jambes, les loisirs se passent essentiellement dans le cercle fermé du quartier, ou de la ville et des villages voisins. C’est la raison pour laquelle le monde associatif est très actif et omniprésent dans toutes les classes de la société.

Il serait présomptueux de prétendre citer toutes les associations roubaisiennes existant en 1893. La loi de 1901, très connue des dirigeants actuels d’associations, n’a bien sûr pas encore été instituée, mais les associations doivent faire une déclaration en préfecture et communiquer le nom de leurs responsables. Tous les domaines d’activités se retrouvent dans cette formule :

Sociétés de secours mutuels  qui se divisent en deux catégories : celles qui rentrent dans le cadre de la loi du 26 mars 1852 dites « Société de Secours Mutuels autorisées » au nombre de 5 à Roubaix en 1893, et les autres qui sont 22.

Société d’anciens militaires : Roubaix en compte 4 auxquelles s’ajoute le Cercle militaire dont le Président est M. Despature. Le grand Cercle a son siège au Grand Café rue de la Gare (actuellement avenue Jean Lebas). On pourrait classer cette catégorie la Société des Sauveteurs du Nord dont la section de Roubaix est présidée par M. Lebon.

Sociétés d’agrément. Ce terme générique recouvre toutes les sociétés de loisirs, les amicales, etc. On en compte 327 en 1893, mais il n’est pas certain que l’on ait tout recensé. Certaines catégories sont fortement représentées : joueurs de boules aux quilles 29 associations ; joueurs de piquet (jeu de cartes) 27 associations ; arbalétriers 24 associations ; canaristes (pinsonneux) 19 associations ; archers 15 associations ; joueurs de boules au rond 13 associations ; pêcheurs à la ligne 9 associations ; escrime 7 associations ; colombophiles 50 associations ; joueurs de boule (bourleux) 53 associations ; joueurs de fléchettes 5 associations, etc.

Sociétés musicales. Les sociétés instrumentales sont au nombre de 7 en 1893. La Grande Harmonie, musique municipale fondée en 1820 dont le directeur est M. Koszul, compte alors 110 membres et elle a son siège à l’Hôtel des Pompiers près de la mairie. La Grande Fanfare fondée en 1860 (son directeur M. Monmarché dirige 70 exécutants) siège rue de Lannoy à l’estaminet Petit. La Concordia, harmonie, a été fondée en 1865, son directeur est M. Brutin, ses 70 membres se réunissent rue Pierre Motte, chez Philémon. La Fanfare Delattre fondée en 1868 est dirigée par M. Knoor, elle a 68 exécutants et son siège est Place de la Fosse aux Chênes, chez Lecry. La Fanfare de Beaurepaire a été créée en 1883. Le directeur en est M. Jules Delvienne, elle a 40 membres et siège boulevard de Beaurepaire à l’estaminet « Au Phare de Beaurepaire ». L’Union des Trompettes est une fanfare de cavalerie fondée en 1883, dirigée par M. Alfred Roussel. Le siège est au 111, Grande Rue. Les Amis réunis sont une fanfare créée en 1885 et dirigée par M. Victor Cousu. Ils sont 25 qui se réunissent rue du Fontenoy à l’estaminet « du Grand Canarien ».

De quoi se divertir : Les sociétés chorales sont encore plus nombreuses : on en compte 10. La Lyre roubaisienne 40 membres, siège 45 rue du Chemin de Fer, chez Inglebert. L’Alliance chorale 65 membres, siège rue Pierre Motte, chez Philémon. L’Union des Travailleurs, 42 membres, siège rue Saint Antoine n° 32. L’Avenir, 35 membres, siège rue de Lannoy n° 63. Les Mélomanes roubaisiens, 56 membres, siège rue Pellart estaminet « Au Bon Coin ». Le Choral Nadaud, 100 membres, siège rue Pauvrée n° 20, chez Constantin. La Coecilia Roubaisienne, 115 membres, siège rue de la Gare. La Cigale, 25 membres, siège rue de Lannoy, 202. La Fraternelle, 25 membres, siège 158, rue du Pile. Et l’Abeille, 28 membres, siège 121 rue de Lannoy, chez Naessens.

A cette multitude de sociétés qui organisent de temps en temps fêtes et banquets, il convient d’ajouter la Société municipale de gymnastique et d’Armes « La Roubaisienne » fondée en 1883 ; Elle était présidée par M.G. Pennel. Elle comptait en 1893, 159 membres actifs, 34 anciens, 38 pupilles et 207 membres honoraires.

Citons encore la Société artistique de Roubaix-Tourcoing dont le siège était à Roubaix et qui rassemblait 275 membres actifs et plus de 500 membres honoraires. Elle organisait des expositions et encourageait les jeunes talents accordant des bourses d’études aux plus méritants.

Les Roubaisiens disposaient donc il y a cent ans d’un éventail artistique, musical et récréatif qui leur permettait de se divertir lorsque les contraintes du travail leur laissaient quelque temps libre.

Le cinéma à Roubaix

L’aventure du cinéma commence à Roubaix en avril 1896…

On sait que la première projection du cinématographe Lumière eut lieu à Lille dans une salle de la rue Esquermoise le 14 avril 1896. Le Journal de Roubaix annonce qu’il sera à Roubaix le 27 Avril 1896 dans la grande arrière salle d’un estaminet du 10 de la rue Neuve, qu’occupe la société de gymnastique l’Ancienne.

Même si c’est Edison qui est crédité dans l’article, il s’agit bien du cinématographe Lumière pour les raisons suivantes : tout d’abord le kinétoscope est un appareil de projection qui ne peut être utilisé que par un spectateur à la fois, moyennant une pièce, dans l’esprit des machines à sous. Ce sont bien les frères Lumière qui vont développer le spectacle de projection de groupe.

D’autre part, il semble, d’après les titres annoncés au programme de la projection et présentés dans l’article de notre journaliste qu’on soit bien en présence des films Lumière : l’Arrêt d’un train, la Descente des Voyageurs, qui correspondent aux films tournés et présentés en 1895 par les deux inventeurs, de même que l’Entrée dans un port, filmé à Boulogne sur mer.

D’autres films complètent le programme, parmi lesquels, une scène d’opéra ou de comédie, un corps de ballet avec les danses les plus compliquées, un forgeron qui bat le fer sur son enclume. Plus locaux sont les films sur les jeux de bourles, combats de coqs ou les prises de vues de Roubaix : la grand’place et la rue de la gare au moment où il y a le plus d’animation.

Il est sans doute de l’intérêt des fabricants de cinématographes de vendre leur appareil, d’où la tentative de familiarisation avec l’utilisation voisine de la photographie. Une fois passée la surprise de la découverte du mouvement, avec des thèmes frappants comme le train, le bateau, symboles du mouvement et du voyage, c’est la vie de tous les jours qui devient l’attraction. Plus que la photographie et ses réalisations figées dans le temps et l’espace, le cinématographe ouvre l’espace du mouvement.

Un article du 3 août 1896 nous indique que le cinématographe n’est pas encore entré dans les mœurs. Sous le titre Kinématographe, curieux mélange de kinétoscope et cinématographe, le journaliste fait un historique, en évoquant la chronophotographie du Douaisien Marey, puis en donnant des explications très scientifiques du matériel, des matières utilisées, allant jusqu’à expliquer le phénomène rétinien à l’origine de l’illusion du mouvement.

On apprend également par cet article que de grandes affiches aux couleurs très voyantes ont attiré les regards des premiers spectateurs. Il s’agissait donc bien d’un spectacle de groupe -on a affiché comme pour le théâtre- et non plus une curiosité uniquement scientifique et individuelle…

 

Philippe WARET

On lira avec bonheur l’ouvrage « Les cinémas de Roubaix », d’Alain Chopin et Philippe Waret

paru aux Éditions Sutton en avril 2005

Souvenance

Em’ Mère

Elle m’a commandé à min père sans doute

Ach’teur, t’aquates les gosses à la Redoute

Pour vous, qui l’ignorez

Ech va, vous faire sin portrait

Elle étot ed taille moyenne

Elle s’applo Julienne

All’mesuro 1 mètre cinquante

Toudis souriante

Avot des cheveux crépus

Et bonne comme un JESUS

Elle étot toudis confiante

Encore jolie et avenante

Plus tard, sin front s’est plissé

Comme les plages du Pas ed Calais

Sin nez, yéto aquilin

I flairo el bonheur, en vain

Au fil des années

Sa taille s’est courbée

Son visage s’est émacié

Mais son rire est demeuré

Ses longues mains effilées

Ont, soulagé et beaucoup donné

C’héto eune bonne MERE

Aussi bonne que min PERE

En 1970, la maladie d’elle, eut raison

Elle s’est éteinte comme un lumechon

Mi, j’ai souffert dins em’tiète

J’ai perdu, celle que, j’appelo «BLANQUE TIETE »

Seuls, la prière et le temps

Effacent la douleur, au fil des ans

La vieillesse est un naufrage

El la mort, un sauvetage

EM’MERE

« Comme ech, j’l’avos quer »

S’ayant toujours bien conduite

El Bon Dieu, l’a accueillie au PARADIS

Elle repose paisiblement dans non natal ARTOIS

Entourée des siens et de la foi

Son sommeil est bercé du chant des alouettes

Qui sans arrêt, répètent « ECH’TAIME BIEN BLANQUE TIETE »

 

J.D.

Inséré par Stéphane Mathon

Les festivals de Jean Prouvost

Le village d’Yvoy le Marron a encore le souvenir de Jean Prouvost venant là tous les week-ends ; il fait son tour dans le village, avec son teckel, sur le bras ou sur les genoux (la mascotte d’Intexa !). Il participe au banquet des Anciens. Un maire attentif pendant 25 ans.
Sa propriété, Saint Jean, date de la guerre 14 ou des soldats canadiens installés dans la région pour couper des sapins, ont construit une maison “Saint Jean” qui ressemble à un chalet de leur pays.
Il y a deux festivals par an. En juin, le festival lui-même et en septembre, la fête des fleurs, avec son feu d’artifice, le tout est public. Pour cet événement, Jean Prouvost fait toujours venir les équipes de Paris Match (son magazine) et attire les meilleurs artistes. Le chapiteau contient 4 à 5 000 places.
Les reportages montrent en juillet 1966, Jean Prouvost, dans une prairie, face à Guy Lux qui anime le jeu des vachettes.
En septembre 1968 les vedettes sont Marie Laforêt, Richard Antony. L’après-midi, on regarde le tournoi de catch. Jean Prouvost est au premier rang. Il suit les Jeux de Midi aussi, c’est un reportage Evelyne Pagès. Autour d’eux les gens du village regardent avec tendresse et un peu fascinés, le “Patron”, heureux et élégant comme d’habitude, abrité sous un parasol.
Les meilleurs artistes ou sportifs interviennent : les Harlem Globe Trotters en juin 1971, Thierry Le Luron, qui imite Jean Nohain, Adamo, Darry Cowl, Claude François, Johnny Halliday, comme le premier ministre Chaban Delmas. La chanteuse Séverine figure au programme (un grand prix de l’Eurovision un peu oublié), SIM est là aussi pour la fête des fleurs.
On ne se lasse pas de parcourir les éphémerides du Festival et ses autres têtes d’affiches : en juin 73, à Saint Jean, une photo de groupe rassemble Gérard Lenormand, Mireille Mathieu, Thierry Le Luron, Mike Brant. Le spectacle est réalisé par Gilbert Carpentier. Cette année-là : le bal du Moulin Rouge, les jeux de la case trésor RTL, le Rugby à XV et le Rugby à VII avec Walter et Claude Spanghero !
En 1973 aussi, les Frères Ennemis, Dalida, Julien Clerc, … en 1974, un baptême de l’air en Hélicoptère et des vedettes toujours : Yves Lecocq, Michel Sardou, Stone et Charden, Carlos, Fabrice …
En juin, 1975 les Blue Bell Girls du Lido. En juin 1976, Patrick Sébastien, Dave, Gilbert Bécaud, Les “Parisiennes”.
En 1977, c’est la fin des festivals, Jean Prouvost décède en novembre 78.